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Afreximbank et Shelter Afrique mobilisent 1 milliard $ pour combler le déficit de logements en Afrique

Alors que le continent comptera près d’un milliard de citadins supplémentaires d’ici 2050, deux institutions financières panafricaines ont signé à Alger un accord stratégique d’un milliard de dollars. Leur ambition est de transformer la manière dont l’Afrique conçoit et finance ses villes.

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L’annonce a été faite lors de la 4e Foire commerciale intra-africaine, organisée dans la capitale algérienne. Afreximbank et Shelter Afrique Development Bank, deux piliers de la finance panafricaine, ont décidé d’unir leurs forces pour mobiliser au moins 1 milliard de dollars au service du logement et des infrastructures urbaines. Une signature qui, au-delà de la solennité des discours, traduit une volonté commune de bâtir des villes africaines inclusives, résilientes et capables d’absorber une urbanisation fulgurante. En effet, l’Afrique fait face à un déficit structurel de plus de cinquante millions de logements, selon la Banque africaine de développement.

Dans des mégapoles comme Lagos, Kinshasa ou Nairobi, l’exode rural alimente chaque année l’arrivée de millions de nouveaux habitants. Les États peinent à suivre le rythme, faute de financements adaptés. Résultat, l’urbanisation informelle prolifère, donnant naissance à des quartiers précaires où les infrastructures de base, eau, électricité, routes, écoles, restent largement insuffisantes. Pour Oluranti Doherty, directrice générale du développement des exportations à Afreximbank, il est urgent de transformer cette pression en opportunité.

« Le logement et l’urbanisation ne doivent plus être vus comme des contraintes mais comme des moteurs de croissance économique et d’intégration régionale », a-t-elle rappelé lors de la cérémonie.

Le cœur de l’accord repose sur la création d’une facilité conjointe de préparation de projets. Derrière ce terme technique se cache un levier essentiel : financer les étapes préliminaires, souvent négligées, qui conditionnent la viabilité d’un projet. Études de faisabilité, structuration financière, mobilisation de partenaire. Autant de phases qui transforment une idée en projet bancable capable d’attirer capitaux privés et soutiens publics. Afreximbank, déjà connue pour son rôle clé dans le financement du commerce intra-africain, y voit une extension naturelle de sa mission. L’institution fondée en 1993 au Caire s’est imposée au fil des décennies comme l’un des bras financiers de l’intégration économique africaine. Avec un portefeuille de projets couvrant 50 pays et un actif total dépassant les 30 milliards de dollars, la banque veut désormais orienter davantage ses financements vers les infrastructures structurantes et la diversification économique.

De son côté, Shelter Afrique n’est plus seulement une société d’investissement. Rebaptisée Shelter Afrique Development Bank (ShafDB), elle est devenue une banque multilatérale de développement spécialisée dans le financement du logement et de l’urbanisme. Forte de ses 44 actionnaires étatiques et institutionnels, ShafDB cherche à se réinventer pour répondre à l’ampleur des besoins. Pour son directeur général, Thierno-Habib Hann,

 le secteur urbain africain souffre de deux handicaps majeurs : le manque de données fiables et l’absence de projets bien préparés

 Un contexte favorable

La signature de ce partenariat ne doit rien au hasard. Elle intervient alors que la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) tente de dynamiser les échanges entre pays africains et de favoriser les investissements intra-africains. La Foire commerciale intra-africaine, organisée tous les deux ans par Afreximbank, en est la vitrine. L’édition 2025 à Alger ambitionne de générer plus de 40 milliards de dollars d’accords commerciaux et d’investissements. Dans ce contexte, l’alliance entre Afreximbank et Shelter Afrique envoie un signal fort, le continent veut parler d’une seule voix lorsqu’il s’agit d’attirer des capitaux et de démontrer sa capacité à innover dans ses mécanismes de financement.

Si le logement est au centre du projet, ses implications économiques sont beaucoup plus larges. Construire des habitations, ce n’est pas seulement ériger des murs. C’est stimuler la demande en ciment, en acier, en matériaux locaux. C’est créer des milliers d’emplois dans la construction et les services urbains. C’est aussi développer les infrastructures complémentaires : routes, réseaux électriques, systèmes d’assainissement. Pour Afreximbank, qui a fait du soutien à l’industrialisation africaine l’un de ses piliers, ce partenariat peut jouer un rôle d’accélérateur. L’amélioration du cadre urbain devrait également favoriser le commerce intra-africain, en offrant des villes mieux structurées, attractives pour les entreprises comme pour les investisseurs.

L’annonce suscite toutefois des interrogations. Comment garantir que ces financements atteindront effectivement les populations les plus vulnérables ? L’histoire récente du logement social en Afrique est jalonnée de projets coûteux mais inaccessibles aux classes populaires. Les experts rappellent qu’un logement dit « abordable » doit coûter moins de trois fois le revenu annuel d’un ménage. Une condition rarement respectée. Pour éviter que les milliards annoncés ne se perdent dans les méandres bureaucratiques, Afreximbank et Shelter Afrique ont intégré un volet de renforcement des capacités internes. Les équipes de ShafDB seront formées à la structuration financière et technique de projets viables, afin d’assurer la pérennité des investissements.

Pour Thierno-Habib Hann,

 il ne s’agit pas seulement de bâtir des logements, mais de construire des villes durables, connectées et capables d’offrir une qualité de vie décente aux citoyens

 Une ambition qui fait écho aux Objectifs de développement durable des Nations unies, notamment celui consacré aux villes et communautés durables. Si Afreximbank et Shelter Afrique parviennent à concrétiser cette ambition, elles pourraient bien écrire un nouveau chapitre de l’histoire urbaine du continent. Dans le cas contraire, l’Afrique continuerait de bâtir ses villes dans l’urgence, au risque de voir ses mégapoles devenir des foyers d’inégalités plutôt que des moteurs de prospérité.

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