Le 18 janvier dernier, l’opérateur économique émirati, Youssef Ahmed Alshamsi, a conduit une mission diplomatique de son pays à Bangui. Le séjour du milliardaire émirati dans la capitale centrafricaine, loin d’être infructueux, a été matérialisé par la signature d’un accord avec le ministre centrafricain des Transports, Djono Ahaba. L’accord prévoit la construction d’un nouvel aéroport répondant aux standards internationaux. Il s’agit d’une plateforme ultramoderne dotée de six pistes d’atterrissage répondant aux normes internationales et pouvant accueillir aussi bien des avions passagers et que des avions cargos.
Les autres travaux prévus sont ceux de construction des infrastructures de fret notamment d’un terminal passager et d’un espace dédié aux vols cargos, la création d’une zone libre dédiée aux cargos et constituée d’entrepôts modernes de stockage, de chambres froides, d’immeubles de bureau devant abriter des entreprises et les services administratifs de l’Etat (douanes, gendarmerie, police aéroportuaire). Il est également envisagé la construction des infrastructures annexes comprenant cinq hôtels de 5 et 4 étoiles, un hôpital aéronautique moderne et un centre de formation régional pour les métiers de l’aérien. Si l’on en sait plus sur le coût du projet (200 millions USD soit 120,3 milliards FCFA) et le délai prévisionnel d’exécution des travaux qui est de 24 mois, il reste l’attribution par l’Etat centrafricain du terrain d’une superficie de 300 hectares, et la signature des cahiers de charge engageant les deux parties.
La RCA dans la ligne de mire de Qatar Aiways et d’Emirates Airlines
L’intérêt des Emirats Arabes Unis pour le secteur des transports aériens en RCA traduit la convoitise du ciel centrafricain par les compagnies émiraties Qatar Aiways et Emirates Airlines. Ces mastodontes du transport aérien ne cachent plus leur ambition de conquérir cette destination où les ont précédées une dizaine d’autres compagnies aériennes opérant des dessertes internationales et régionales. Il s’agit d’Air France, Ethiopian Airlines, Interair, Afriqiyah Airways, Angola Airlines (Taag), Asky Airlines République Centrafricaine, Bako, Benin Golf Air, Sudan Airways et la compagnie tchadienne Toumaï Air Tchad.
Toutefois, l’état des infrastructures de l’actuel aéroport de Bangui-M’Poko, auquel s’ajoutent des contraintes liées au standard, n’est visiblement pas du goût des compagnies émiraties et ne permet pas à ces géants du ciel émiratis de se déployer dans cet aéroport. Cette infrastructure désuète et datant de plusieurs décennies ne brasse pas les recettes à la hauteur des attentes en raison des routes de desserte défectueuses, de la difficulté d’opérer des vols nocturnes, elle-même due au mauvais éclairage, des faibles stocks de carburant et l’offre hôtelière en-deçà des standards voulus, entre autres.
Les Brics à la manœuvre
Selon les autorités centrafricaines, la nouvelle plateforme aéroportuaire annoncée depuis plusieurs années va permettre d’établir une ligne directe entre Bangui et Dubaï grâce à la création d’un hub cargo, et d’accroître ainsi le trafic et les échanges entre les deux capitales. Le joyau va dès lors s’imposer comme une référence dans la sous-région. Une aubaine pour la République centrafricaine, dont la position de pays enclavé représente le principal obstacle aux exportations de ce pays contraint de compter sur les pays voisins, tels que le Cameroun, pour ses échanges extérieurs.
Le 11 avril 2023, le président centrafricain Ange-Faustin Touadera avait accueilli à Bangui une délégation de l’Alliance des Brics (Russie, Chine, Inde, Brésil et Afrique du Sud) conduite par la présidente de cette organisation, Larissa Zelentsova, et le représentant de l’Alliance en Afrique centrale et de l’Ouest, Ahoua Don Mello.
Quatre mois plus tôt, en janvier de la même année, la même délégation « de haut niveau » comprenant de nombreux hommes d’affaires avait conclu une convention avec Bangui. A travers celle-ci, l’Alliance des Brics s’engageait à accompagner la RCA longtemps meurtrie par des guerres civiles, dans la mise en œuvre de plusieurs infrastructures de développement à travers le pays. Parmi les sept secteurs économiques ciblés, figurent l’industrie minière, les transports, la monnaie et les infrastructures digitales. Le pays envisage également la construction d’une nouvelle ville. L’accord conclu le 18 juin s’inscrit dans le contexte de ces promesses faites par les Brics.