Le gouvernement fédéral du Nigeria a ordonné à la Nigerian National Petroleum Company (NNPC) Limited de vendre le pétrole brut à la raffinerie Dangote et à d’autres raffineries locales en nairas et non en dollars américains. C’est le résultat de la réunion du Conseil exécutif fédéral (FEC) que le président Bola Tinubu a présidée lundi, 29 juillet 2024 à Abuja. Cette mesure permettra de réduire les problèmes liés aux taux de change sur le marché entre le dollar et le naira, ainsi que sur les prix des carburants.
Ainsi, effectuer des transactions en Naira plutôt qu’en dollars pourrait réduire la pression sur les réserves extérieures du Nigéria, contribuant ainsi à stabiliser le taux de change dollar-naira et à contrôler l’inflation. C’est également une petite victoire pour Aliko Dangote qui essuie de vives critiques au sein de l’industrie pétrolière notamment sur la qualité du carburant produit et sur des pratiques monopolistiques. Notons que c’est Afreximbank et d’autres banques commerciales du Nigeria qui organisent les échanges entre Dangote et NNPC Limited.
L’intervention qui change la donne va mettre fin au besoin de lettres de crédit internationales et permettre au pays d’économiser des milliards de dollars qu’il utilise pour importer du carburant raffiné,
a déclaré Onanuga, l’assistant spécial du président Tinubu.
445 000 barils de brut par jour destinés à la consommation interne
L’annonce stipule que la NNPC, la compagnie pétrolière publique, vendra aux raffineries locales, 445 000 barils de brut par jour destinés à la consommation interne, à un taux de change fixe qui sera révisé tous les six mois.
Actuellement, ces transactions sont effectuées en dollars américains, ce qui met à rude épreuve la liquidité en devises du Nigéria,
a indiqué le gouvernement. Quant à la raffinerie du groupe Dangote, elle recevra de la NNPC, 4 cargaisons de brut par mois contre un besoin actuel de 15 cargaisons qui nécessitent une dépense de 13,5 milliards USD (soit 8 171 milliards de FCFA). Cela représente donc un taux d’approvisionnement garanti de 26,6%, le reste devant être fourni par les autres producteurs et les négociants internationaux.
Pour Dangote Petroleum Refinery (DPR), il ne peut s’agir que d’une bonne nouvelle, puisque la raffinerie est désormais assurée d’avoir plus d’un quart de la matière première à sa disposition, ce qui était loin d’être le cas ces dernières semaines. En effet, si le gouvernement fédéral avait prescrit aux producteurs de réserver une part de leur pétrole aux raffineries locales, certaines usent de stratagèmes pour échapper à cette exigence et continuer à exporter toute leur production.
En juin dernier, Devakumar Edwin, vice-président du pétrole et du gaz chez Dangote Industries Limited (DIL), accusait les compagnies pétrolières internationales qui exploitent le pétrole au Nigéria de gonfler les primes pour exporter leur pétrole et ne pas le vendre à la raffinerie contraignant cette dernière à des importations notamment des États-Unis et du Brésil. Cette nouvelle survient quelques jours après un conflit entre le propriétaire de la raffinerie Dangote, Aliko Dangote, et certaines agences pétrolières du gouvernement nigérian.
La Nigeria National Petroleum Corporation n’a plus que 7,2 % des parts de la raffinerie Dangote
Premier producteur africain de pétrole et abritant l’une des plus grandes raffineries au monde, le Nigéria est le théâtre de pénuries de carburants depuis quelques jours. Cette crise est principalement imputée à la suppression des subventions au carburant et aux complexités de la chaîne d’approvisionnement, selon le média Ouest France.
Pour rappel, le gouvernement nigérian s’est doté de quatre raffineries – deux à Port Harcourt, une à Kaduna et une à Warri – mais elles ne fonctionnent pas, si bien que les populations portent tout leur espoir sur la raffinerie Dangote pour les sauver de cette situation. Le pays aurait dû produire environ 70 millions de litres d’essence par jour si ses quatre raffineries fonctionnaient de manière optimale.
Le plan initial prévoyait que le gouvernement nigérian, par l’intermédiaire de la Nigeria National Petroleum Corporation (NNPC), prenne une participation de 20 % dans la raffinerie. Mais d’après ce que Dangote a déclaré à la mi-juillet, « la NNPC n’a plus 20 % des parts de la raffinerie Dangote… elle n’en a plus que 7,2 % ». La raffinerie de Dangote a expliqué que les compagnies pétrolières internationales (IOC) pour le Nigeria n’acceptent pas de leur vendre du pétrole brut, ou qu’elles le vendent à un prix supérieur au prix officiel fixé par la Nigerian Upstream Petroleum Regulatory Commission (NUPRC), chargée de superviser les activités du secteur pétrolier en amont. Selon les explications du patron de la NUPRC, Gbenga Komolafe, le processus de mise à disposition du brut aux raffineurs s’effectue sur la base du principe « du consentement entre acheteur et vendeur ».
Qualité faible du diesel ?
Cependant, le régulateur du pétrole et du gaz au Nigeria, Nigerian Midstream and Downstream Petroleum Regulatory Authority (NMDPRA), allègue que la qualité du diesel produit par la raffinerie Dangote est faible et inférieure à celle du diesel importé, rapporte-le média BBC Afrique.
Dangote nous a demandé de suspendre ou d’arrêter toutes les importations, en particulier d’AGO et de Jet Kero, et d’envoyer tous les négociants à la raffinerie. Mais cela n’est pas bon pour la nation en termes de sécurité énergétique, et ce n’est pas bon pour le marché en raison du monopole,
a indiqué Ahmed Farouk, le chef de la NMDPRA. Mais, Dangote a démenti en déclarant que son diesel était le plus propre pour le marché nigérian. En plus, Dangote avait déclaré qu’il n’était pas prêt à vendre sa raffinerie au gouvernement nigérian si ce dernier voulait l’acheter, dans l’édition du 22 juillet du journal en ligne nigérian Premium Times. L’homme le plus riche d’Afrique, Aliko Dangote envisage d’ailleurs de créer une société de négoce de pétrole, probablement basée à Londres, pour l’aider à gérer l’approvisionnement en brut et en produits de sa nouvelle raffinerie au Nigeria, selon des sources de Reuters informées du dossier.
Le Nigeria, bien qu’il soit l’un des plus grands producteurs de pétrole brut d’Afrique, dépend toujours de l’importation pour tous les produits pétroliers tels que le Premium Motor Spirit (PMS) que les populations utilisent comme carburant, le kérosène, le diesel et le carburant d’aviation pour les avions. Pour les Nigérians on pourrait s’attendre à ce que ce renforcement des capacités du raffinage local influe sur les coûts du carburant à la pompe, le pays étant épargné en grande majorité de la conjoncture internationale. Doté d’une capacité de production de 650 000 bpj, la raffinerie du groupe Dangote ne devrait tourner à plein régime qu’à partir du 1er trimestre 2025.