Concrétiser la coopération Sud-Sud. C’est l’ambition du Forum d’affaires Côte d’Ivoire–Gabon, qui s’est ouvert ce 18 novembre 2025 à Libreville. L’événement, présidé par le Vice-Président du Gouvernement par intérim et Ministre d’État, Ministre de l’Économie et des Finances, Henri-Claude Oyima, s’est tenu sous le thème : « Côte d’Ivoire-Gabon, un modèle économique Sud-Sud ». Organisé par les patronats et institutions économiques des deux pays, le Forum réunit pendant deux jours dirigeants d’entreprises, investisseurs, responsables publics et partenaires techniques autour de secteurs variés : agro-industrie, infrastructures, mines, énergies renouvelables, startups & innovation, aquaculture, anacarde, élevage, etc. L’objectif est clair : créer un pont d’opportunités entre l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, en mettant l’accent sur les échanges de savoir-faire et l’intégration économique régionale.
Le partenariat entre la Côte d’Ivoire et le Gabon doit être un exemple de coopération gagnant-gagnant. Un moteur de transformation réel fondé sur la création de valeur ajoutée locale, l’innovation et la souveraineté économique. Le FACIGA doit être un levier, pas un événement ; un point de départ, pas un aboutissement. En ouvrant ce forum, nous envoyons un signal clair : nos économies avancent, nos ambitions convergent et nos entreprises pourront transformer ensemble l’avenir du continent
, a déclaré Henri Claude Oyima, ministre de l’Économie, des Finances, de la Dette et des Participations, chargé de la Lutte contre la vie chère du Gabon.
Une coopération historique en expansion
Au-delà des 50 ans de liens historiques, les deux pays multiplient leurs échanges dans plusieurs domaines prioritaires.
Au cours de ces dernières années, les échanges commerciaux entre nos deux pays ont doublé, passant de 200 millions à près de 400 millions de dollars. Cette progression démontre un potentiel encore largement sous-exploité. Les entreprises ivoiriennes ont montré leur savoir-faire dans l’agro-transformation, le BTP, les technologies financières et les services. Les entreprises gabonaises, de leur côté, offrent un accès privilégié au marché de la CEMAC, doté de plus de 60 millions de consommateurs. Elles sont en quête de débouchés, notamment dans les secteurs des services, du secteur forestier et des zones économiques spéciales »,
a ajouté le ministre gabonais de l’Economie.
La souveraineté alimentaire au cœur des échanges
Le Forum met en lumière une question cruciale : la souveraineté alimentaire. Malgré une richesse forestière et des terres fertiles, le Gabon dépend encore largement des importations . En effet, 60 à 70 % des produits alimentaires consommés dans le pays proviennent d’Europe, d’Asie et d’Afrique de l’Ouest, fragilisant la souveraineté nationale et pesant sur le pouvoir d’achat des ménages. La Côte d’Ivoire, quant à elle, dispose de nombreux atouts : producteur mondial de cacao, important exportateur de noix de cajou, d’huile de palme, de caoutchouc et de café, et dotée d’une solide filière de transformation, le pays est souvent cité comme modèle de développement agricole. Dans cette perspective, le Forum a pour ambition d’encourager les partenariats public-privé dans le secteur agroalimentaire, favoriser les coopérations inter-entreprises et renforcre l’intégration économique continentale.
La sécurité alimentaire existe dans un pays lorsque toutes les personnes vivant dans ce pays ont à tout moment la possibilité physique, sociale et économique de se procurer une nourriture suffisante, saine et nutritive, leur permettant de satisfaire leurs besoins et de mener une vie active et saine. Pour qu’une population soit en situation de sécurité alimentaire, quatre dimensions doivent être assurées simultanément :
- La disponibilité des denrées alimentaires : il doit y avoir suffisamment d’aliments sur les marchés ;
- L’accès à l’alimentation : les prix doivent être abordables et les infrastructures de distribution existantes ;
- L’utilisation des aliments : sécurité sanitaire, accès à l’eau potable et diversité alimentaire ;
- La stabilité : disponibilité et accès durables même en temps de choc endogène ou exogène,
,explique Kobénan Kouassi Adjoumani, ministre de l’Agriculture, du Développement rural et des productions vivrières de la Côte d’Ivoire.
Les agropoles : levier central pour la Côte d’Ivoire
En Côte d’Ivoire, la stratégie de sécurité alimentaire repose sur les agropoles, mises en place dans le cadre du PNIA 2 (Programme national d’investissement agricole). Ces pôles agro-industriels modernisent la production, attirent les investisseurs et transforment localement les cultures vivrières et d’exportation ( comme le riz, manioc, ananas et hévéa) tout en créant des chaînes de valeur intégrées. Plusieurs régions pilotes, comme le Bélier et le Gôh, bénéficient déjà de programmes combinant infrastructures rurales, accompagnement technique et financement pour les jeunes agri preneurs. La Côte d’Ivoire compte aujourd’hui 9 agropoles et prévoit de les développer davantage.
La refondation économique du Gabon
Depuis 2023, le Gabon a engagé un chantier ambitieux de refondation de son modèle économique, visant à diversifier ses sources de croissance et moderniser ses secteurs stratégiques. L’objectif est d’atteindre un taux de croissance de 6,5 % d’ici 2026, porté par la transformation locale des produits agropastoraux, des minerais et des services. Dans ce contexte, la coopération avec la Côte d’Ivoire prend une importance particulière. Libreville entend s’inspirer de l’expérience ivoirienne en matière d’agropoles et de filières agricoles intégrées pour renforcer ses propres chaînes de valeur. À l’inverse, Abidjan souhaite tirer des enseignements de l’expérience gabonaise dans le secteur minier, la transformation du bois et d’autres domaines stratégiques.
Le Forum d’affaires Côte d’Ivoire – Gabon devient ainsi un cadre privilégié pour échanger des savoir-faire à travres panels thématiques et des rencontres B2B ; et surtout discuter du financement des projets structurants, de la commercialisation des produits locaux. L’objectif ultime reste de créer des chaînes de valeur solides reliant Libreville à Abidjan dans les années à venir. Et pour y parvenir, les entrepreneurs devront faire preuve d’audace et d’initiative, plutôt que de rester dans l’attentisme.
