Selon le Global Timber Index (GTI), plusieurs pays africains ont enregistré une amélioration de leur activité, contrairement à de nombreux marchés d’Asie et d’Amérique latine, restés en territoire de contraction. Le Ghana se positionne en tête des marchés africains les plus dynamiques, avec un GTI de 60,5 %, marquant son huitième mois consécutif au-dessus du seuil de 50 %, synonyme d’expansion. Le Gabon affiche également un retour en zone de croissance, son indice s’établissant à 52,6 % après plusieurs mois difficiles. À l’inverse, la République du Congo (41,9 %), la Malaisie (26,1 %) et le Mexique (35,4 %) demeurent en zone négative. La Thaïlande et le Brésil, après une embellie temporaire, sont retombés sous le seuil d’expansion. Ces écarts traduisent une reprise inégale, largement conditionnée par les réalités locales plutôt que par une dynamique mondiale homogène.
L’analyse des sous-indices GTI met en évidence une différenciation croissante entre les segments du secteur. L’indice dédié aux panneaux dérivés du bois s’est maintenu à 54,6 % en août, enregistrant un cinquième mois consécutif en zone d’expansion. À l’inverse, l’indice relatif à la production de bois brut s’est établi à 37,7 %, traduisant une faiblesse persistante de ce segment. Cette évolution confirme une tendance structurelle, indiquant que, les activités intégrant davantage de transformation résistent mieux aux cycles de la demande internationale. Pour les investisseurs, le centre de gravité du secteur se déplace progressivement de l’exportation de grumes vers les produits à plus forte valeur ajoutée, moins exposés à la volatilité des marchés. En Afrique centrale, la filière bois a terminé le mois d’août sur des prix globalement stables, mais dans un environnement encore contraint.
La demande internationale reste faible, tandis que les conditions locales ont pesé sur l’activité. Les inondations ont perturbé les réseaux de transport au Cameroun et en République du Congo, ralentissant l’acheminement du bois vers les ports. Les échéances électorales prévues dans plusieurs pays de la sous-région ont également renforcé l’attentisme des opérateurs. Le Gabon se distingue néanmoins par une dynamique plus favorable. Selon le Panorama sectoriel du premier trimestre 2025 publié par le ministère de l’Économie et des Finances, l’indice composite d’activité du secteur bois a progressé de 15 % par rapport au trimestre précédent, porté principalement par la demande chinoise. Les producteurs signalent une offre suffisante de grumes et de sciages d’Azobé, notamment à destination des acheteurs européens, avec les Pays-Bas comme principal débouché pour certaines applications industrielles. La demande pour l’Okan progresse également, entraînant une hausse des prix en fin de période.
Contraintes logistiques et exigences accrues de traçabilité
Cette amélioration reste toutefois encadrée par des contraintes persistantes. Le transport ferroviaire demeure un point de friction majeur, les wagons étant prioritairement affectés aux expéditions de manganèse. Les producteurs du sud du Gabon peinent à sécuriser des capacités suffisantes, malgré des interventions récentes des autorités. Par ailleurs, le renforcement des exigences de traçabilité modifie les conditions d’exploitation. Depuis janvier, chaque lot de sciages doit être associé à des données GPS liées aux grumes, contrôlées au port d’Owendo. D’ici la fin de l’année, l’ensemble des concessionnaires devront fournir des relevés aériens de leurs zones forestières. Si ces mesures renforcent la crédibilité du bois gabonais sur les marchés internationaux, elles augmentent également les coûts opérationnels à court terme.
Au Cameroun, la filière bois évolue dans un contexte plus incertain. Les inondations ont affecté les communautés locales et perturbé le transport du bois, tandis que le climat politique a conduit plusieurs entreprises à suspendre leurs projets d’investissement. Les exportations se poursuivent néanmoins à faible régime, avec des approvisionnements stables en Azobé, Ayous et Sapelli. Malgré ces contraintes, le Cameroun conserve une position de premier plan sur le marché international. En 2024, le pays s’est hissé au rang de premier exportateur mondial de sciages d’Iroko et de Sapelli, générant 122,2 milliards de F CFA de recettes. Cette performance confirme la compétitivité de la filière, tout en mettant en évidence sa forte dépendance à des produits peu transformés, exposant le secteur aux cycles de la demande mondiale.
Au-delà des dynamiques conjoncturelles, le paradoxe africain demeure. Le continent abrite environ 16 % des forêts mondiales, mais ne représente que 2 % des exportations mondiales de produits forestiers. Le bassin du Congo, malgré l’importance de ses ressources, reste marginal dans les chaînes de valeur mondiales. Cette situation s’explique par la faiblesse de la transformation locale, des infrastructures encore insuffisantes et un accès limité aux segments les plus rémunérateurs du marché. Pourtant, les perspectives existent. La croissance démographique, l’urbanisation et les besoins en matériaux de construction soutiennent la demande intérieure. Le développement des industries de transformation, combiné au renforcement des normes de durabilité, pourrait repositionner le bois africain comme un levier stratégique de création de valeur.
