Du fait du déploiement massif des énergies renouvelables et des nouvelles formes de mobilités, les dépendances des pays industrialisés aux métaux sont à anticiper, selon l’économiste Emmanuel Hache, porteur du projet ANR Generate : « elles pourraient causer de nouveaux rapports de forces voire des tensions à l’échelle internationale », prévient-il.
Or, l’Afrique possède, selon l’agence Ecofin, entre 20 et 90 % des réserves mondiales de 11 minéraux nécessaires à la transition énergétique, dont 55 % des réserves de manganèse, 44 % pour le cobalt et plus de 90 % pour les métaux du groupe du platine qui comprend le ruthénium, le rhodium, le palladium, l’osmium et l’iridium. C’est un métal précieux extrêmement rare.
La grande majorité du platine provient de l’Afrique du Sud et est également extrait, en plus petites quantités, au Zimbabwe. Le platine a suscité beaucoup d’intérêt ces derniers temps en raison du boom de l’hydrogène vert. Comme de plus en plus de fabricants se tournent vers les sources d’énergie verte, les investisseurs pensent que le platine pourrait connaître une hausse dans les années à venir.
Le président de la Banque africaine de développement (BAD), Akinwumi Adesina, au cours de son intervention la semaine dernière, au Berlin Energy Transition Dialogue en Allemagne a présenté la richesse de l’Afrique en matière de ressources minérales indispensables à la transition énergétique comme une chance pour son industrialisation :
Nous ne devrions pas nous contenter d’exporter, nous devrions fabriquer. L’Afrique est l’endroit idéal pour produire les batteries lithium-ion qui alimenteront les voitures allemandes,
a déclaré le président de la BAD, alors que la ruée d’acteurs étrangers vers le sous-sol africain bat son plein, souligne Ecofin.
L’intérêt de ces réserves pour l’Union européenne, les États-Unis, ou la Chine est un atout à bien capitaliser par les dirigeants africains, pour accélérer la transformation sur le continent, a insisté le président de la BAD. Les États africains doivent donc s’appuyer sur ce potentiel pour multiplier et diversifier les bonnes affaires.
A titre d’illustration, afin d’approvisionner ses constructeurs automobiles en matériaux pour batteries électriques, l’Union européenne, rappelle Ecofin, compte investir dans la transformation du cobalt et du lithium de la République démocratique du Congo. Le pays regorge de millions de tonnes de lithium, métal devenu star des batteries de voitures électriques, logé notamment dans les vestiges de l’ancienne cité minière de Manono, au sud-est du pays. On parle aussi des négociations en cours avec la Namibie qui développe plusieurs projets de lithium notamment à Karibib couvrant une superficie d’environ 1 000km2, afin de faciliter la transformation locale puis l’exportation vers les usines en Europe.
Les États-Unis ne sont pas en reste, illustration, l’accord entre Lifezone Metals et le gouvernement tanzanien portant sur la première usine de production de nickel de qualité batterie en Tanzanie. Annonces faites la semaine dernière par la vice-présidente des États-Unis Kamala Harris, au cours de sa visite en Tanzanie, ajoutant que le nickel sera livré sur le marché américain et le marché mondial dès 2026.
La conclusion de l’économiste Emmanuel Hache illustre les enjeux et donc les opportunités autour des métaux du continent africain : « Le cobalt présente un niveau de criticité géologique élevé qui doit être relativisé selon le type de batteries utilisé dans le secteur du transport.
Le risque qui pèse sur ce minerai est de prime abord géopolitique du fait de ses problématiques d’approvisionnement, la production minière étant concentrée en République démocratique du Congo (RDC), un pays très instable politiquement », dit-il, évaluant la demande à l’horizon 2050.