La mission principale de la comission, précisée par le gouvernement, est d’analyser, dans les contrats, « la présence centrale de l’intérêt national ainsi que ses mécanismes de sauvegarde en vue d’assurer, le cas échéant, les objectifs d’équilibre requis ».
Dans une déclaration faite à la télévision d’Etat, la RTS, le 19 août en soirée, le Premier ministre du Sénégal, Ousmane Sonko a annoncé l’installation de la commission chargée de baliser le terrain afin que les autorités puissent engager des discussions avec les multinationales qui évoluent dans le secteur extractif. Il s’agit en fait de la commission chargée d’examiner les contrats pétroliers, composée d’experts dans les secteurs juridique, fiscal et énergétique.
Le président Bassirou Diomaye Faye, au lendemain de sa prestation de serment en avril 2024, avait déjà annoncé un audit complet des secteurs minier, pétrolier et gazier avec l’objectif de renégocier certains contrats « défavorables » au pays. Ceci en conformité avec une promesse de campagne électorale consistant à rediscuter les accords conclus avec les compagnies étrangères sur les ressources naturelles du pays. En cette circonstance solennelle, le président Bassirou Diomaye Faye n’avait pas caché sa détermination à réviser les accords d’exploitation des ressources naturelles du Sénégal, et principalement celles du sous sous-sol riche en or, phosphate, fer et zircon.
L’exploitation de nos ressources naturelles, qui appartiennent au peuple, fera l’objet d’une attention particulière de la part de mon gouvernement. Je vais procéder à la divulgation de la propriété effective des entreprises d’extraction (et) à un audit de l’état des finances de ces entreprises,
affirmait sans contour le président élu.
Promesse de campagne
Le gouvernement sénégalais avait d’ailleurs précisé l’opérationnalisation de cette promesse de campagne du président de la République, dans un communiqué publié le mercredi 10 juillet 2024 :
Le Premier ministre a informé le Conseil des ministres de la mise en place, sur instruction du président de la République, par arrêté en date du 3 juillet 2024, d’un comité d’examen des contrats conclus dans les secteurs stratégiques,
avait indiqué le gouvernement.
Ce comité a pour mission principale d’analyser, dans les contrats susvisés, la présence centrale de l’intérêt national ainsi que ses mécanismes de sauvegarde en vue d’assurer, le cas échéant, les objectifs d’équilibre requis,
a-t-il ajouté.
A l’ouverture des travaux de la septième édition de l’initiative Mining on Top Africa, le 03 juillet, le ministre sénégalais de l’Énergie, du Pétrole et des Mines, Birame Souleye Diop a réitéré la volonté du gouvernement conduit par Ousmane Sonko de ne pas laisser le pays dépossédé de ses richesses minières, d’aller jusqu’au bout de la transparence et de la défense des intérêts économiques de son pays et donc de mettre un terme au pillage systématique de ses ressources naturelles.
Le ministre sénégalais de l’Énergie, du Pétrole et des Mines a ainsi dénoncé « l’assujettissement » des Etats africains aux puissances qui exploitent les minerais du continent. Il a ainsi défendu la souveraineté économique de l’Afrique dans un contexte mondial de course aux minerais et aux métaux précieux, ce alors que l’industrie de l’automobile électrique connaît une croissance sans précédent, favorisée par le développement exponentiel des énergies vertes et non polluantes.
L’option des autorités sénégalaises de renégocier les contrats pétroliers met en ébullition l’opinion publique ainsi que l’intelligentsia africaine. Pour Dr Idrissa Doucouré, président du Conseil mondial des investissements et des affaires à Londres, renégocier n’est pas seulement une possibilité,
c’est une nécessité. Les contrats de recherche et de partage de production d’hydrocarbures (CRPP) peuvent être révisés. Et les exemples africains le prouvent : le Nigeria a augmenté ses revenus après révision de ses accords pétroliers, l’Angola a réduit ses coûts de production, et le Ghana a vu une hausse des recettes fiscales après renégociation de ses contrats miniers,
souligne-t-il dans une tribune publiée ce mardi 20 août, sur le site internet seneplus.com.
Partenariats équilibrés
Au moment où le Sénégal a cédé une part importante de ses ressources à des compagnies étrangères, limitant les retombées économiques, les Émirats Arabes Unis, eux, ont maximisé les bénéfices de leurs ressources en créant des partenariats équilibrés et en investissant localement. Résultat : une économie diversifiée et prospère. Pour rattraper ce retard, le Sénégal doit impérativement renégocier ses contrats. En s’inspirant des E.A.U., nous pourrions transformer nos ressources en un levier de développement durable et prospère,
promet Dr Idrissa Doucouré.
La renégociation des contrats conclus dans les secteurs stratégiques est une option risquée pour le Sénégal, dans la mesure où elle pourrait provoquer des tensions avec les investisseurs et impacter l’attractivité du pays, comme l’indique l’agence Ecofin. L’ex-président Macky Sall avait estimé, dans un entretien publié le 19 mars par Bloomberg, que la renégociation des contrats pourrait avoir un impact négatif sur l’économie. Mais rien n’y fait, la réforme est lancée, le Sénégal engage résolument la bataille de la renégociation des contrats stratégiques, notamment dans le secteur pétrolier et gazier.