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Gabon : les défis pour relever le secteur industriel

Longtemps dominée par l’exploitation des ressources naturelles, l’économie gabonaise est aujourd’hui en marche vers la diversification, avec l’industrialisation comme levier stratégique. Cependant, elle ne représente que 10% de la création de la richesse nationale, et malgré des avancées notables, les défis restent nombreux. Déficit énergétique, manque d’infrastructures, difficultés d’accès aux financements, entre autres.

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Gabon : les défis pour relever le secteur industriel

De nos jours, l’industrialisation est un pilier stratégique du plan de transformation économique du Gabon. Dans ce pays, le secteur industriel (pétrole y compris), représente plus de 50 % du produit intérieur brut en 2023, portée principalement par les hydrocarbures et les mines. Toutefois, le gouvernement mise sur l’industrialisation des autres filières pour soutenir la croissance hors pétrole. Une ambition incarnée par des initiatives telles que les Zones d’Investissement Spéciales (ZIS), à l’image de celle de Nkok, qui accueille aujourd’hui près de 140 entreprises issues d’une vingtaine de pays. « Un certain nombre d’entités qui m’ont permis de savoir qu’il y a quand même de choses qui ont été faites. La grande visite de la zone industrielle de Nkok m’a permis de savoir que nous ne sommes pas, comme beaucoup le pensent, en retard. Beaucoup de choses ont été faites. Je pense que c’est un endroit, c’est un tel lieu qui est un symbole fort, et qui permet de prendre le Gabon en exemple », indiquait le ministre de l’Industrie Lubin Ntoutoume, lors d’une visite récente à la ZIS de Nkok

Attractivité croissante de la ZIS de Nkok

Dans cette zone industrielle, l’entreprise camerounaise Prometal a récemment fait son entrée avec un investissement de plus de 52, 08 millions Usd (soit 30 milliards de Fcfa), pour la construction d’une usine métallurgique et sidérurgique intégrée, spécialisée dans la production d’alliages de ferromanganèse à partir de minerai de manganèse locaux, destinés aux marchés national et international. En plus, selon un communiqué de l’Autorité administrative de la ZIS de Nkok, en fin d’année 2024, trois nouvelles usines ont rejoint la ZIS et deux y ont relancé leurs activités. Les nouvelles usines en production sont : Gabon Flooring Company, Jaguar Wood Industries Zerp, Ylg Wood Gabon Zerp, Zhong Xin Wood et Metanoia Gabon Zerp Nkok, cette dernière étant spécialisée dans la sidérurgie. Les usines qui ont relancé leurs opérations sont Gabon Shengda Investment Co Ltd et Shuang Sheng Wood, toutes deux axées sur la transformation du bois.

Les grands défis du secteur industriel gabonais

L’industrie gabonaise rencontre plusieurs obstacles majeurs. L’un des principaux défis réside dans l’énergie. « Le Gabon est à la recherche d’un crédit d’énergie (…) Il y a un déficit énergétique qui nous oblige malheureusement à ne pas créer, implanter des industries. Ça, c’est le premier frein », s’indignait le ministre de l’Industrie, Lubin Ntoutoume. Notons que, le Gabon dispose d’un mix énergétique d’une capacité installée de 704 MW en 2023, selon le Plan national de développement pour la Transition (Pndt), contre une demande estimée à 1 039 MW. Ce qui traduit une offre énergétique déficitaire d’environ 336 MW, alors que le pays cible 1 280 MW au cours des prochaines années. D’autres difficultés se posent à l’industrialisation du Gabon, notamment la faiblesse, voire le manque d’infrastructures, de réseaux de transport, et d’installations portuaires. Bien que le pays bénéficie d’un cadre naturel favorable avec ses mines et forêts, l’absence d’infrastructures modernes et efficaces ralentit la transformation des ressources locales en produits finis, limitant ainsi la valeur ajoutée à l’économie nationale.

De plus, le secteur industriel gabonais souffre d’un manque de compétitivité. La production industrielle locale est souvent plus coûteuse par rapport à celle des pays voisins, en raison de coûts d’énergie élevés et d’une faible productivité.

Financement, éternel casse-tête

En plus de toutes ces difficultés, le problème de financement représente le goulot d’étranglement de l’industrie gabonaise ; l’accès au financement est restreint pour les Petites et moyennes entreprises (PME) locales, qui manquent souvent de soutien pour innover et se développer. Une problématique qui a d’ailleurs été abordée lors des récentes Journées de l’Industriel Gabon 2025, tenues du 20 au 22 mars à Libreville. En marge de cet évènement, s’est tenu le Forum sur le financement des industries gabonaises. Si le secteur industriel ne participe pas assez à la diversification de l’économie nationale, c’est parce que l’un des piliers du secteur, le financement, reste difficilement accessible. « Le financement de l’industrialisation demeure un problème pour nombre de pays d’Afrique, et notamment pour notre pays. Le système bancaire et financier du pays reste lui aussi à développer, et sa contribution au financement de l’industrialisation, et à la formation de son PIB est faible. La deuxième remarque, c’est qu’il accorde des crédits à court terme plutôt qu’à long terme, et l’accès à ces crédits est sujet au dépôt de garantie de niveau prohibitif. Dans ces conditions, les financements disponibles pour les PME sont donc peu appropriés à l’accompagnement des projets d’industrialisation », a indiqué le Vice-Premier ministre, Alexandre Barro Chambrier, rapporté par notre confrère Gabon review.

En 2024, « l’industrie ne représente que 10% de la création de la richesse nationale », renseignait le membre du gouvernement. Le pays enregistre une croissance économique fragile, dépendante des exportations de ses produits de rente. Au regard du peu d’impact que ce secteur a dans l’économie nationale, le Vice-Premier ministre regrettait le « caractère encore embryonnaire » du tissu industriel gabonais, 63 ans après l’Indépendance du pays, rapporte le média local, Gabon Review.

Les perspectives pour l’industrie

Malgré ces défis, le Gabon présente des perspectives intéressantes pour le secteur industriel, notamment grâce aux réformes en cours dans le cadre du Plan Stratégique Gabon Émergent (PSGE). L’objectif est d’accélérer l’industrialisation du pays en exploitant de manière plus efficiente les ressources naturelles, tout en favorisant la création de chaînes de valeur locales. Les autorités gabonaises ont mis en place des mesures incitatives, telles que des zones économiques spéciales (ZES), pour attirer les investisseurs étrangers et encourager l’innovation. Le secteur de l’agro-industrie représente une opportunité majeure. Le Gabon, avec son climat équatorial, dispose de conditions idéales pour développer des cultures de rente telles que le cacao, l’huile de palme et les produits agricoles transformés. Le développement de l’industrie du bois est également porteur, avec une mise en valeur accrue des ressources forestières pour créer des produits finis comme les meubles et les matériaux de construction. Enfin, le secteur de l’industrie énergétique, avec l’exploitation des énergies renouvelables (solaire et hydroélectrique), pourrait offrir des solutions durables pour répondre à la demande énergétique et soutenir l’industrialisation.

Mégaprojets

Notons toutefois que le pays s’est engagé dans la réalisation de nombreux mégaprojets, tels que la construction du barrage hydroélectrique de Booué (600 MW) ; la ligne ferroviaire Belinga–Booué–Mayumba ; le projet minier de Belinga ; la centrale hydroélectrique de Ngoulmendjim (82 MW) ; la centrale solaire d’Ayémé (120 MW) ; la centrale solaire d’Oyem (50 MW) ; le port en eaux profondes et zone industrielle de Mayumba ; le technopôle numérique et industriel de Libreville ; le projet Digital Gabon (digitalisation de l’administration) ; et l’Échange dette-nature pour la protection des océans (500 M USD). Le Gabon est à un tournant de son développement industriel. Si le pays parvient à surmonter ses défis structurels en matière d’infrastructures, d’accès au financement et de compétitivité, le secteur industriel pourrait devenir un pilier central de son économie diversifiée.

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