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Afrique : le marché du malt en effervescence sur fond de boom brassicole

Porté par la croissance du marché de la bière, le malt suscite un nouvel engouement industriel en Afrique. Alors que le continent reste marginal dans la production mondiale, les investissements se multiplient pour répondre à une demande locale en plein essor. C’est le cas récent des  108,4 millions $ injectés par Soufflet en Afrique du Sud, afin d’accentuer la course au malt africain.

9 Min Lecture

L’Afrique ne produit que 5% du malt mondial. Mais, elle enregistre la plus forte croissance de la planète, avec un bond de plus de 7% par an, selon un rapport du département de l‘Agriculture des États-Unis (USDA)  publié en 2024. L’explosion de la demande en bière,  dopée par une population jeune, urbaine et une classe moyenne en expansion, tire toute la filière. Pourtant, 70% du malt consommé reste importé, faute d’infrastructures de transformation. Face à ce déséquilibre, les grands noms du secteur, comme Soufflet, Heineken ou Diageo, investissent massivement pour s’implanter localement.

La consommation de bière en Afrique a bondi de 5,2% entre 2018 et 2023, selon une analyse de l’Africa Brewing Conference publiée en 2023, un chiffre bien supérieur à la moyenne mondiale. Trois facteurs expliquent cette dynamique : une démographie en forte croissance avec un âge médian très jeune, une urbanisation rapide qui devrait toucher 50% de la population, d’ici 2030, et une hausse des revenus, surtout en Afrique de l’Ouest et de l’Est. Ces éléments créent une demande croissante pour des produits industriels comme la bière.

Résultat : la demande de malt explose. Selon Statista, le continent devrait atteindre 2,1 millions de tonnes, d’ici 2025, concentrée principalement en Afrique du Sud ; au Nigeria ; en Éthiopie ; au Kenya et au Maroc. Cette concentration montre à la fois le potentiel du marché et les disparités régionales. L’Europe et l’Amérique du Nord dominent actuellement la production de malt, représentant 70% du marché mondial, avec des leaders comme l’Allemagne, la France et les États-Unis.

À titre de comparaison, l’Afrique n’a produit que 1,2 million de tonnes en 2023, soit seulement 5% de la production mondiale, selon le rapport de l’USDA en 2024. Cependant, la croissance rapide de l’industrie, soutenue par des coûts de production compétitifs et des politiques d’incitation, fait de l’Afrique, une région stratégique pour les investissements futurs. Le continent affiche la croissance la plus rapide, attirant des investissements directs étrangers, notamment pour l’intégration locale de la production de malt. Les brasseries cherchent à sécuriser leur approvisionnement, en réduisant leur dépendance aux importations. 

La montée en puissance des multinationales

Des groupes comme Soufflet, Malteurop, Diageo et Heineken sont en première ligne, avec des investissements massifs dans des infrastructures locales en Afrique du Sud, en Éthiopie, au Kenya et au Maroc. L’objectif est de rapprocher la production de malt des marchés consommateurs, de réduire les coûts logistiques et de renforcer l’intégration de la filière. L’Afrique du Sud, le Nigeria, l’Éthiopie et le Maroc sont les principaux sites d’investissement, avec des capacités de production croissantes destinées à répondre à la demande intérieure et à exporter.

Soufflet, une entreprise française se positionnant parmi les leaders mondiaux de la production de malt destiné à l’industrie brassicole, poursuit son développement en s’implantant en Afrique du Sud, marquant ainsi l’expansion de ses activités en dehors des frontières européennes. Dans le district de Sedibeng, le groupe prévoit d’investir environ 108,4 millions de dollars pour établir une nouvelle malterie. Cette annonce, faite le 7 mars 2025, s’inscrit dans le cadre d’un accord stratégique avec Heineken, un grand brasseur néerlandais.

Ce projet permettra à Soufflet Malt d’élargir sa présence en Afrique, où elle ne disposait jusqu’à présent que d’une malterie opérationnelle en Éthiopie, active depuis 2021. La mise en service de cette nouvelle installation est attendue pour le premier semestre 2027, avec une capacité annuelle projetée de près de 100 000 tonnes. Dans le cadre de l’accord avec Heineken, la production de la malterie sera majoritairement destinée à approvisionner les opérations de la brasserie dans la région. L’Afrique du Sud, avec ses grandes brasseries comme SABMiller (propriété d’Anheuser-Busch InBev), est un marché stratégique pour Soufflet.

Heineken, géant néerlandais de la brasserie, a adopté une politique d’expansion ambitieuse en Afrique, notamment en Éthiopie où le groupe a doublé sa capacité de production de malt depuis 2021. En plus de son investissement dans la malterie éthiopienne, Heineken a également agrandi sa présence au Kenya, où elle a investi dans des infrastructures de maltage pour soutenir ses brasseries locales. L’objectif est de réduire la dépendance aux importations et de sécuriser l’approvisionnement en malt pour ses brasseries en Afrique de l’Est, comme l’indique Reuters.

Heineken a investi plus de 200 millions de dollars dans les infrastructures de maltage en Afrique depuis 2018, selon Forbes. Ce chiffre englobe l’agrandissement de ses capacités en Éthiopie et au Kenya, ainsi que la mise en place de nouvelles usines pour répondre à la demande locale croissante. Le groupe prévoit de réaliser un profit substantiel en augmentant ses parts de marché dans ces régions.

Diageo, propriétaire de marques telles que Guinness et Johnnie Walker, a renforcé sa présence en Afrique en mettant en place une malterie au Kenya, avec un investissement de 70 millions de dollars, selon Financial Times. L’objectif est de sécuriser l’approvisionnement pour ses brasseries locales, tout en augmentant sa capacité de production pour répondre à la demande croissante en Afrique de l’Est.

En plus de son investissement au Kenya, Diageo est également impliqué dans des projets d’intégration de la filière, notamment en formant les agriculteurs locaux à la culture d’orge pour améliorer la qualité de l’approvisionnement en matière première. En 2021, Diageo a consacré 50 millions de dollars supplémentaires pour améliorer ses capacités de maltage en Éthiopie, selon The Guardian.

Malteurop, l’un des plus grands producteurs mondiaux de malt, poursuit son expansion en Afrique avec des projets notables en Afrique du Sud et en Éthiopie. Selon Le Monde, les investissements de Malteurop visent à alimenter en malt les brasseries locales et à renforcer l’intégration des chaînes d’approvisionnement dans la région. Malteurop a consacré environs 108,4 millions $ à son développement en Afrique du Sud et en Éthiopie, selon la Banque mondiale. Le groupe espère augmenter ses profits grâce à une réduction des coûts logistiques et à un approvisionnement plus efficace en orge, tout en consolidant sa position de leader dans le secteur du malt.

Des défis structurels à surmonter

Malgré les progrès, l’Afrique reste dépendante des importations pour près de 40% de sa consommation de malt, selon l’USDA. Cela est dû à plusieurs facteurs : le manque d’infrastructures locales de maltage, la qualité variable de l’orge cultivée localement et l’instabilité des récoltes, souvent affectées par les conditions climatiques. Les défis logistiques, notamment les coupures d’électricité fréquentes et des réseaux de transport inefficaces, compliquent davantage la situation.

Pourtant, certains pays, comme l’Éthiopie, développent des stratégies pour renforcer leur autonomie. Des initiatives telles que la formation d’agriculteurs à la culture d’orge en Éthiopie, ou les ambitions du Maroc de réduire ses importations de malt de 40%, d’ici 2026, montrent qu’il existe un réel potentiel pour structurer la filière localement.

L’Afrique est à un tournant. Si les obstacles restent nombreux, les investissements croissants et les initiatives locales laissent entrevoir un avenir prometteur pour le secteur du malt. À condition de surmonter les défis structurels et climatiques, l’Afrique pourrait devenir, d’ici 2030, un acteur incontournable de la production mondiale de malt.

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