Professeur, selon vous quels sont les enjeux de la diversification de l’économie gabonaise encore très marquée par le pétrole ?
Je crois que l’enjeu pour l’économie gabonaise aujourd’hui c’est de passer d’une économie de rente et d’intermédiation à une économie de production. C’est-à-dire une économie qui crée en son sein de la valeur ajoutée au lieu d’en importer, et au lieu d’exporter de la matière brute. C’est en cela que doit consister la diversification de l’économie gabonaise. Il s’agit donc d’abord de faire un point sur l’état actuel de cette économie. Et à partir de cet état et de l’analyse des besoins -c’est-à-dire de la demande interne, mais aussi de la demande mondiale-, de voir quels sont les secteurs qui peuvent être développés et sur lesquels on peut investir pour pouvoir créer de la valeur. Et pour pouvoir créer cette valeur, que l’ensemble d’infrastructures soient mises en place et qu’un niveau de capital humain soit formé pour pouvoir accompagner et porter cette diversification de l’économie. Et je pense que ce forum est le bienvenu parce qu’il permet justement d’impliquer l’ensemble des acteurs, l’ensemble des forces vives dans la réflexion afin de définir de manière concrète les étapes et le contenu de cette stratégie de diversification.
- Professeur, selon vous quels sont les enjeux de la diversification de l’économie gabonaise encore très marquée par le pétrole ?
- Faut-il réunir toutes ces conditions avant de se lancer pleinement dans cette diversification ?
- Le forum est placé sous le signe du développement durable, qu’est-ce que cela signifie ?
- Comment la République du Gabon peut-elle capter efficacement le marché de la sous région Afrique centrale ?
- Comment la commande publique peut-elle contribuer à l’essor des PME-PMI (Petites et Moyennes Entreprises et Petites et Moyennes Industries) ?
- Comment attirer davantage d’Investissements directs étrangers à l’heure où l’on observe leur raréfaction dans le pays ?
Faut-il réunir toutes ces conditions avant de se lancer pleinement dans cette diversification ?
L’état de lieu est indispensable, mais la réunion de toutes les conditions n’est pas une nécessité parce que cette entreprise se situe dans le temps. Maintenant, il faut séquencer ce long terme en période et à chaque période, définir les objectifs à atteindre et les moyens à mobiliser. Et au terme de la période, faire une évaluation de ce qui a pu être réalisé et de ce qui ne l’a pas été. Pour ce qui ne l’a pas été, il faudra s’interroger sur ce qui a fait en sorte qu’on n’atteigne pas les objectifs. Cela est un préalable avant de passer à la période suivante.
Le forum est placé sous le signe du développement durable, qu’est-ce que cela signifie ?
Il y a un certain nombre de financements innovants liés au caractère durable de l’activité qui peuvent être connus. Je pense à tout ce qui doit être fait comme investissement, comme financement spécifique. Ce, pour qu’en développant la pêche par exemple, celle-ci puisse s’opérer sous la contrainte de ne pas épuiser rapidement les ressources disponibles. Il peut en être de même de la forêt, comment faire en sorte que l’exploitation des richesses forestières ne se fasse pas au détriment de la protection de cette richesse pour les générations futures.
Le Gabon produit beaucoup de minerais : comment faire en sorte que l’exploitation minière ne soit pas par exemple destructrice de l’environnement. C’est autant de questions qui doivent être adressées dans le cadre de cette nouvelle stratégie.
Comment la République du Gabon peut-elle capter efficacement le marché de la sous région Afrique centrale ?
Il faut développer un tissu d’entreprises nationales gabonaises. En partant de la petite et moyenne entreprise. Pour cela il y a un certain nombre de mesures et moyens d’accompagnement qui doivent être prises par l’État, car c’est lui qui définit le cadre et accompagne le développement de l’entreprise privée. Cela concerne la formation humaine, l’inclusion financière, des mesures d’accompagnement pour réduire le coût des financements qui permettent de financer l’investissement. Cela suppose un ensemble de mesures pour les aider non seulement à capter la demande nationale, mais aussi d’aller à la conquête de la demande extérieure. Parce que le Gabon ne peut pas se limiter à son seul marché, il doit se projeter sur le marché sous régional, sur le marché international.
Comment la commande publique peut-elle contribuer à l’essor des PME-PMI (Petites et Moyennes Entreprises et Petites et Moyennes Industries) ?
Vous savez que la demande publique est un élément déterminant de la demande intérieure. La commande publique est un élément déterminant de la demande intérieure de biens et services. On peut faire en sorte qu’une partie de cette demande, soit d’abord captée et donc orientée vers des PME soit par le biais de la sous-traitance, soit par le biais de la fourniture des services, soit par le biais de la fourniture d’un certain nombre de biens. Lorsqu’il y a par exemple des commandes des matériels de bureau, on peut voir quelle est la part qui peut être adressée aux PME pour satisfaire cette demande. Mais cela suppose aussi qu’en matière de dette par exemple, on se préoccupe non seulement du service de la dette extérieur, mais aussi du paiement et de la régularité du service de la dette intérieure qui s’adresse dans le cadre de la commande publique à ces PME. Parce que très souvent on se préoccupe de rembourser la dette extérieure mais on ne se préoccupe pas de payer les services fournis par ces PME et cela affecte le cours de leur activité et parfois même leur survie.
Comment attirer davantage d’Investissements directs étrangers à l’heure où l’on observe leur raréfaction dans le pays ?
Pour ce qui est de cette problématique, je mettrai l’accent d’abord sur le développement de l’investissement par les entreprises gabonaises. Je crois que c’est le problème le plus important. Parce que comme le dit l’économiste Robert Menasse, « capital is made at home ». C’est bien d’attirer les investissements extérieurs, mais c’est aussi important d’impliquer les nationaux dans la formation du capital. Donc, pour ma part, il faudrait encourager l’investissement intérieur par le développement des PME (et même au delà des PME), par la création des champions nationaux.
