Les prix mondiaux de l’huile de palme ont connu un rebond de 20% en 2024, conséquence directe de plusieurs facteurs combinés : le climat, les politiques gouvernementales des principaux producteurs comme l’Indonésie, et la demande croissante dans les pays émergents. Cette tendance haussière s’est accélérée à mesure que la production a diminué en Indonésie et en Malaisie, les deux premiers producteurs mondiaux.
En 2025, les prévisions indiquent une augmentation de la demande mondiale de produits dérivés de l’huile de palme de 5% par an, notamment pour le biodiesel et les applications industrielles. Selon les experts, les prix de l’huile de palme pourraient franchir la barre des 5 000 ringgits cette année, portés par une demande toujours plus forte. L’Indonésie envisage d’introduire le mandat B40, nécessitant une consommation interne accrue de 1,7 million de tonnes supplémentaires.
L’Afrique, avec son potentiel de production et de transformation, pourrait capter une partie de cette demande croissante, si des investissements adéquats sont réalisés dans les infrastructures et la technologie. Si le continent parvient à moderniser sa production, à développer ses capacités de transformation et à répondre à la demande mondiale, tout en restant vigilant sur l’aspect environnemental, il pourrait non seulement renforcer son autosuffisance, mais aussi devenir un acteur clé sur le marché mondial de l’huile de palme.
Un nouveau cadre pour l’Afrique
En effet, la demande en huile de palme en Afrique est en constante augmentation, soutenue par la croissance démographique, l’urbanisation rapide et l’augmentation de la classe moyenne. Selon un rapport de la FAO, la consommation d’huile de palme sur le continent a augmenté de 3,5 % par an, ces dernières années, et les prévisions indiquent que cette tendance devrait se poursuivre. Le marché africain représente ainsi une demande intérieure de plus de 8 millions de tonnes par an, bien que la production locale ne couvre qu’une partie de ces besoins.
La demande de produits à base d’huile de palme est particulièrement forte dans les secteurs de l’agroalimentaire, des cosmétiques et des produits pharmaceutiques. Dans l’agroalimentaire, l’huile de palme est utilisée comme matière grasse pour la cuisson, les produits de boulangerie et les snacks, tandis que les industries cosmétiques l’utilisent pour la fabrication de savons, de crèmes et de lotions. L’Afrique reste fortement dépendante des importations d’huile de palme raffinée. En 2024, le continent a importé environ 8 millions de tonnes d’huile de palme, principalement en provenance d’Asie (Indonésie, Malaisie).
Transformer l’Afrique en hub de production et de transformation d’huile de palme
L’une des clés pour l’Afrique, selon les experts, réside dans la modernisation de sa chaîne de valeur. Bien que des pays comme le Nigeria et la Côte d’Ivoire soient de grands producteurs, leur capacité de transformation locale reste faible. Actuellement, une grande partie de l’huile de palme produite en Afrique est exportée sous forme brute, ce qui limite la valeur ajoutée. L’Afrique peut cependant transformer cette situation en un avantage en construisant des usines de raffinage modernes, et en investissant dans des technologies de transformation plus efficaces.
Des projets de grande envergure dans des pays comme la Côte d’Ivoire, où plusieurs usines de raffinage sont en développement, montrent que la transformation locale peut augmenter les marges bénéficiaires de 30 % à 40 % par rapport à la vente d’huile brute. De plus, en créant un marché local robuste pour l’huile de palme raffinée et ses dérivés, l’Afrique pourrait réduire sa dépendance aux importations et s’assurer une place plus importante sur les marchés internationaux. Au Cameroun, par exemple, la production nationale, estimée à 400 000 tonnes en 2024, ne couvre que 60 % des besoins.
La facture lourde des importations met en lumière l’urgence d’investir dans des infrastructures de transformation. Des initiatives locales, comme l’introduction de variétés de palmiers à haut rendement et des partenariats public-privé, sont déjà en cours. Cependant, elles nécessitent un appui financier accru pour moderniser les chaînes de valeur et rendre le secteur compétitif.
Un effort perpétuel
L’Afrique est l’un des plus grands producteurs mondiaux d’huile de palme, bien que la majorité de sa production soit encore brute et non transformée. Selon les données de la société de recherche Oil World, le continent produit environ 5 millions de tonnes d’huile de palme, un chiffre qui devrait augmenter au cours des prochaines années, si les investissements dans l’agriculture et la transformation sont renforcés. Les principaux producteurs africains sont : le Nigeria : plus grand producteur d’huile de palme en Afrique, avec une production estimée à 2,6 millions de tonnes en 2024, selon l’Association nationale des producteurs de palme du Nigeria (NPPAN). Cependant, le pays dépend encore fortement des importations pour satisfaire sa demande intérieure, qui croît chaque année de manière significative.
La Côte d’Ivoire, avec une production d’environ 1,4 million de tonnes, est un autre acteur majeur sur le marché africain. Bien que la production soit importante, le pays fait face à des défis en matière de transformation, ce qui l’oblige à importer une partie de son huile de palme raffinée. Le Ghana avec 600 000 tonnes en 2024, est également un producteur clé, mais la capacité de transformation reste limitée. Le pays tente d’accroître ses investissements dans les infrastructures locales pour se positionner davantage sur le marché mondial.
Le Liberia et Cameroun ont des productions respectivement estimées à 300 000 tonnes et 350 000 tonnes en 2024. Bien qu’en plein développement, leur production ne suffit pas encore à couvrir leurs besoins internes, ce qui les oblige à importer des quantités considérables d’huile de palme raffinée.
La hausse des prix de l’huile de palme en 2024 et les prévisions pour 2025 rappellent l’importance de stratégies nationales adaptées. Pour l’Afrique, l’enjeu est double : répondre à la demande croissante, tout en développant une industrie de transformation locale capable de soutenir la chaîne de production. À long terme, ces efforts pourraient transformer une contrainte en véritable levier économique pour le continent.