Des acteurs institutionnels des six pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) et des experts de l’Agence française de développement (AFD) étaient réunis à Douala, dans la capitale économique camerounaise, les 28 et 29 janvier 2025 dans le cadre d’un atelier visant à examiner le projet de capitalisation relatif à l’élaboration d’une stratégie et d’un cadre juridique et institutionnel régional sur les partenariats publics-privés (PPP) dans cet espace communautaire. Plus concrètement, il a été question pour les représentants pays et les experts français, d’apprécier l’état d’avancement du projet d’accompagnement de la Commission de la Cemac pour l’appui à l’élaboration d’une stratégie et d’un cadre juridique et institutionnel régional des partenariats publics-privés.
Ce projet démarré en 2021 a été clôturé en février 2024 par l’adoption de deux textes (stratégie commande publique et directive partenariat public-privé) en Conseil des ministres impliqués dans le développement des infrastructures dans la sous-région. Il se décline en trois composantes, à savoir : l’appui à la mise en place d’un cadre juridique et institutionnel aux niveaux régional et national, et le renforcement des capacités des administrations ; l’appui à l’identification et à la maturation des projets prioritaires et immédiats pour amorcer la constitution d’un flux de projets ; le soutien à l’identification et à la mobilisation de financement à long terme.
Un projet d’1 million d’euros cofinancé par l’AFD et la Cemac
Le projet remonte à 2013, année où une feuille de route adoptée par les partenaires avait été présentée aux institutions régionales et aux Etats membres de la Cemac, lors de deux séminaires organisés à Lomé, puis à Brazzaville pour en valider les orientations. Si au cours desdits ateliers, la Cemac et la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Bdeac) avaient exprimé leurs besoins d’assistance, c’est en juin 2016 que le Congolais Pierre Moussa, alors président de la Cemac, a formalisé cette demande auprès de la Banque mondiale, qui, à son tour s’est tournée vers ses partenaires français « pour proposer une réponse coordonnée répliquant la démarche UEMOA (Union économique et monétaire Ouest Africain) ». Le retard s’explique par la dispersion de la Cemac suite aux événements de Bangui (résurgence de conflits armés à Bangui), d’une part, et aux changements de mandat au sein de la Commission et des équipes du côté d’Expertise France et de l’AFD, d’autre part.
Le projet a été cofinancé par la Cemac et l’AFD à hauteur de 1 million d’euros, dont 500 000 euros pourvus par la Cemac et l’autre moitié par le ministère français de l’Economie et l’AFD. La capitalisation a pour objectif de « retracer et documenter le déroulé du projet, les choix opérationnels et/ou stratégiques, afin de garder une trace écrite et alimenter la mémoire collective ; définir les concepts et approches utilisés afin de développer une compréhension commune ; identifier les modalités opérationnelles efficaces et les bonnes pratiques développées, afin de consolider les acquis ; documenter les innovations dans une perspective de passage à l’échelle ; tirer des leçons d’un partenariat pour assurer sa continuité ou l’améliorer ; analyser l’expérience d’accompagnement et la mise en œuvre réalisée et valoriser les expériences et savoir-faire des acteurs impliqués », explique-t-on.
Un manque criard des infrastructures en zone Cemac
Le projet d’harmonisation du cadre juridique et institutionnel intervient dans un contexte où les besoins en infrastructures en Afrique centrale sont criards et concernent tous les secteurs de la vie économique de cette communauté. Pourtant, en l’absence de ce cadre juridique et institutionnel viable et clairement défini, il était difficile, jusqu’ici, d’obtenir une implication efficace du secteur privé dans la réalisation desdites infrastructures. Or, l’apport et la participation de ce secteur sont cruciaux dans la mise en œuvre des projets de développement, les moyens financiers et techniques des États étant généralement très limités. Les différentes parties impliquées dans cette initiative louable sont d’avis que l’adoption d’une stratégie et d’un cadre juridique et institutionnel harmonisés, donnera un coup d’accélérateur à la mise en œuvre des projets identifiés jusqu’ici, et à la recherche des financements y afférents.
Ce qu’il faut déjà dire, c’est que sans ces textes, c’était difficile de mettre en œuvre un projet en partenariat public-privé dans l’espace communautaire de la Cemac parce que, pour mettre en œuvre un projet, il faut l’encadrement légal et règlementaire. Maintenant que ces textes ont été adoptés, on peut espérer que les projets infrastructurels qui sont identifiés par la Commission de la Cemac, pourront être réalisés sur la base d’un apport du secteur privé, parce que c’est ça la particularité du partenariat public-privé. Dans le partenariat public-privé, il est question de faire recours non seulement à l’expertise du secteur privé, mais également au financement de ce secteur privé pour la réalisation des infrastructures, compte tenu de ce que les Etats, aujourd’hui, n’ont plus la capacité budgétaire suffisante pour pouvoir dérouler leurs programmes infrastructurels. C’est donc quelque chose, une avancée significative qui a été faite là au niveau communautaire,
explique le Camerounais, Dieudonné Bondoma, président Du Conseil d’appui à la réalisation de contrats de partenariat (CARPA).
C’est vraiment un pas important. Aujourd’hui, vous avez une directive qui va pouvoir harmoniser des contrats de PPP, c’est-à-dire qui va pouvoir favoriser le développement de projets d’infrastructures et de services au niveau des sous-régions, notamment les projets régionaux : comment encadrer un projet d’infrastructure entre deux pays, par exemple, entre le Cameroun et la République centrafricaine ? Cette directive va pouvoir faciliter ce travail juridique et la stratégie de commande publique qui est plus large, qui s’attache à la fois au partenariat public-privé et aux marchés publics,
se félicite, pour sa part, Carole Devidal, expert commande publique à Expertise France et coordinateur du projet.
Reste que les deux textes adoptés devront être transposés dans les législations nationales de chacun des six pays de la Cemac (Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale et Tchad).