Cette rencontre entre les autorités gabonaises et les dirigeants d’Eramet était très attendue depuis l’annonce, par le président du Gabon, de l’interdiction de l’exportation du manganèse à l’état brut dès 2029. Au cours de cette rencontre, les deux parties ont acté plusieurs mesures en faveur de la souveraineté économique du Gabon et de la transformation locale de ses ressources, notamment le manganèse que la société française exploite dans le pays à travers sa filiale la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog).
Il s’agit entre autres de : la transformation au Gabon de 2 millions de tonnes d’alliage de manganèse, la création de plus de 16 000 emplois directs et indirects à venir pour les gabonais, le rapatriement et la traçabilité des flux financiers liés au sous-sol gabonais, la gabonisation des postes stratégiques au sein de Comilog et de Setrag, la construction d’une centrale électrique, l’implantation du siège social en terre gabonaise.
C’est un moment fort, qui illustre notre volonté de construire une économie plus juste, plus locale et résolument tournée vers l’avenir. Ce succès est le fruit d’un dialogue exigeant mais constructif, fondé sur le respect de nos intérêts mutuels,
a indiqué le chef d’État gabonais Oligui Nguema. En poste depuis le 26 mai 2025, le nouveau Directeur général d’Eramet a pour mission de renforcer l’ambition d’Eramet à l’international. Sa mission est d’accompagner un groupe qui grossit. Lors de l’audience qui s’est tenu à Oyem, il a d’ailleurs réaffirmé l’engagement de son groupe à accompagner activement, en consolidant son partenariat avec les autorités gabonaises.
Rappelons tout de même qu’à l’annonce de la décision d’interdiction de l’exportation brute du manganèse gabonais dès 2029, des responsables du groupe Eramet avaient émis des réserves quant à l’application de cette décision. Aujourd’hui, on assite alors à un « une reconsidération de position » soudaine que les experts observent à la loupe.
C’est une stratégie, le Gabon reste un pays très important pour le groupe Eramet,
affirme l’expert en mines Dr Bareja Youmssi, contacté par la rédaction de Invest-Time. Le conseil d’administration d’Eramet n’a pas encore approuvé un plan de développement sur le Gabon, donc tout reste possible Eramet peut toujours décider de quitter le Gabon. Ils sont entrain de travailler sur tous les scenarii. Je peux vous assurer que le groupe Eramet n’acceptera pas ce qui sera défavorable pour leurs actionnaires, ils ne vont pas baisser leur seuil de profit pour satisfaire le nouveau régime Gabonais. Ils ont une bonne marge de manœuvre, ils savent exactement où faire fléchir les gabonais .de toutes les façons 2029 ne sera pas là date butoir pour Eramet,
ajoute-t-il. Selon cet expert en mines, par ailleurs enseignant – chercheur dans plusieurs universités, le pays devrait d’abord mettre sur pied les conditions favorables à la réalisation de cet objectif à l’instar de la couverture énergétique nécessaire, la construction des infrastructures de communication entre autres.
Premier producteur de manganèse en Afrique, le Gabon exporte encore près de 80% de sa production, principalement vers la Chine et l’Europe. Rappelons que la question de la transformation locale du manganèse gabonais n’a pas commencé aujourd’hui. Car 20 % de sa production est transformée localement, via les unités industrielles d’Eramet à Moanda, notamment le Complexe métallurgique de Moanda (C2M) et le Complexe industriel de Moanda (CIM) crée en 2015, pour la transformation à hauteur de 100 000 tonnes d’alliages de manganèse. Mais ces structures industrielles tournent au ralenti. En 2024, seulement 18 000 tonnes de silico-manganèse ont été exportées, indique notre confrère Gabon Media Time.
Somme toute, l’ambition de transformer localement le manganèse au Gabon d’ici 2029 constitue une niche d’opportunités à saisir pour les les différents acteurs de la filière.
