La PCA d’Eramet avait exprimé des réserves au lendemain de l’annonce de l’interdiction de l’exportation brute du manganèse gabonais dès 2029, selon vous qu’est ce qui pourrait expliquer cette “reconsidération de position” de la part de l’entreprise ?
C’est une stratégie, le Gabon reste un pays très important pour le groupe Eramet. En dehors du manganèse, Eramet contrôle et gère le Transgabonais ainsi que le port minéralier d ‘Owendo. Le conseil d’administration d’Eramet n’a pas encore approuvé un plan de développement sur le Gabon, donc tout reste possible. Eramet peut toujours décider de quitter le Gabon. Ils sont entrain de travailler sur tous les scenarii. Je peux vous assurer que le groupe Eramet n’acceptera pas ce qui sera défavorable pour leurs actionnaires, ils ne vont pas baisser leur seuil de profit pour satisfaire le nouveau régime Gabonais. Ils ont une bonne marge de manœuvre, ils savent exactement où faire fléchir les gabonais.
Pensez-vous vous que cette mesure pourra effectivement être mise en oeuvre dans les quatre prochaines années ?
De toutes les façons, 2029 ne sera pas la date butoir pour Eramet. La transformation totale du manganèse au Gabon sera progressive et sur 10 ans au moins. Le Gabon doit d’abord faire sa part de job avant d’exiger la transformation totale des minerais. Je ne vois pas le Gabon basculer dans la transformation totale du manganèse d’ici 2029, c’est utopique, ils ont beaucoup de travail à faire (énergie, chemin de fer, port, main d’œuvre qualifiée), ils devront aussi travailler sur leur coût opérationnel, l’accès à l’énergie doit être très moins cher.
Comment la transformation locale pourrait-elle contribuer à l’industrialisation plus large du pays et à la diversification de l’économie gabonaise ?
La transformation locale, lorsqu’elle est associée à l’industrialisation, peut jouer un rôle crucial dans le développement économique d’un pays, en particulier dans les zones rurales. Elle permet de créer de la valeur ajoutée aux ressources locales, favorisant la diversification économique, la création d’emplois et la réduction de la dépendance aux importations. Au Gabon, ils doivent juste éviter de tomber dans le même piège de la transformation locale du bois décrétée sous Ali Bongo qui avait finalement accouché d’une souris.
Des réformes du code minier ou industriel sont-elles envisageables pour mieux encadrer la transformation locale du manganèse ?
Le code minier actuel du Gabon prévoit la transformation partielle ou totale de toutes les substances exploitées. La décision du Conseil des ministres juste sur la transformation totale du manganèse pose un problème de conformité avec le code minier. De ce fait il faut prévoir une révision du Code minier.
Il devra aussi avoir un décret d’application pour déterminer le cahier de charge d’une transformation locale du manganèse. Il faudra réellement définir ce que le Gabon entend par transformation locale du manganèse, jusqu’à quel niveau les opérateurs vont transformer le manganèse ? Et c’est en fonction de tout cela que nous serons capables de mesurer son impact sur l’économie, le social et le niveau d’industrialisation.
Propos recueillis par Leonel Douniya
