La floriculture est un secteur économique en plein essor. Surtout en Afrique, un continent qui possède un climat favorable à cette filière, mais dont la culture et la consommation des fleurs naturelles sont peu ancrées dans les habitudes. Par conséquent, il existe de réelles opportunités d’affaires dans le commerce des fleurs en Afrique.
Car, la majeure partie des fleurs cultivées en Afrique est vendue en Europe, ou dans les marchés émergents d’Asie, notamment au Japon et en Chine, où l’on enregistre un grand marché potentiel. Et depuis quelques années, la floriculture gagne du terrain dans les pays comme le Kenya, l’Éthiopie et le Rwanda qui sont les plus grands producteurs sur le continent africain.
La forte demande des pays occidentaux pour les fleurs africaines constitue une opportunité d’entreprendre dans ce secteur en pleine croissance. Le développement de cette filière d’exportation repose sur une organisation logistique qui garantit par voie aérienne un temps d’accès adapté à ce bien périssable et fragile. Dans ce domaine, le Kenya s’est bâtit une réputation.
Le pays est considéré comme l’un des premiers exportateurs de fleurs au monde et le premier producteur de roses à l’international. Le Kenya a généré 709 millions de dollars en 2019 (troisième poste en termes de revenus après le thé et le tourisme), alors que le total des exportations de l’Ethiopie s’est élevé à 241 millions de dollars pour cette année pré-covid 19. Comme pour la plus part des produits horticoles, les performances de la filière sont tributaires de l’état de demande sur le marché.
En effet, selon Clément Tulezi, Directeur général du conseil floricole (KFC), le Kenya a engrangé 718 millions de dollars grâce aux expéditions de fleurs coupées en 2022. Une enveloppe en baisse de 18% par rapport aux 878 millions de dollars obtenus un an plus tôt. Cette contreperformance est imputable au recul de 7% observé au niveau du volume des envois qui a totalisé 195 000 tonnes contre un stock de 210 000 tonnes précédemment.
Selon Clément Tulezi, la filière a fait face durant l’année écoulée à une baisse de la demande sur ses principaux marchés d’exportation que sont l’Union Européenne et le Royaume-Uni, et qui absorbent environ 70% des envois des marchandises. Le marché de la floriculture du Kenya génère environ 600 000 emplois et fait vivre 2 millions de Kenyans, selon les données du Bureau national des statistiques.
Les fermes horticoles se sont implantées dans la vallée du Rift sur les rives du lac Naivasha, deuxième plus grande étendue d’eau douce du Kenya, un site exceptionnel, paradis des ornithologues. C’est ici que sont cultivées aujourd’hui la plupart des roses qui ornent les vases des acheteurs européens. 100 millions de roses sont produites chaque année par la Nini Flower Farm.
Ces bouquets à bas prix, prêts pour l’export, seront essentiellement vendus en Europe occidentale et en Russie. Une armée de petites mains cueille et trie les fleurs, à 6 500 kilomètres de leur destination. Au Kenya, le succès du commerce de la rose doit beaucoup à la main-d’œuvre féminine et peu coûteuse. À Nini Farm, 550 ouvrières travaillent six jours sur sept, à un rythme effréné, à la cueillette et à l’empaquetage des fleurs, cultivées hors-sol sous d’immenses serres. Ici, 17 variétés de roses sont triées et assemblées.
La rose fait bon marché
Dans l’industrie floricole, la rosiculture est la principale contributrice avec plus de 87% de la valeur des expéditions. Le marché mondial de la rose fonctionne sur le principe du « juste à temps » qui doit répondre à des pics de consommation annuels tout en produisant à contre-saison. Le Kenya s’est spécialisé dans une rosiculture à hauts rendements, intensive en capital et en travail.
Ses atouts sont une main d’œuvre formée, un aéroport de fret important à Nairobi et des conditions agronomiques propices. Une politique de gestion de l’eau s’est toutefois avérée nécessaire pour traiter les effets environnementaux de cette monoculture. La consommation de roses augmente régulièrement d’environ 10 % par an en moyenne entre 1990 et 2008 pour progresser ensuite à un rythme plus lent à cause de la crise financière et de ses conséquences.
L’ouverture du bloc de l’Est, l’émergence des nouvelles classes moyennes expliquent l’augmentation de la production globale depuis les années 1980. Celle-ci s’est accompagnée d’une redistribution spatiale importante.
Pour certains observateurs, les fleurs évoquent des sentiments et des émotions à cause de leur beauté, élégance, mais aussi, leurs couleurs et formes. On distingue plusieurs qualités de fleurs, dont les meilleures sont : la rose (l’une des plus belles fleurs et les plus sensuelles qui existent au monde), l’orchidée, la pivoine, le lys, le muguet.
La plupart des gens achètent des fleurs pour des occasions spéciales (Saint-Valentin, mariages, anniversaires et autres cérémonies). Le prix des fleurs varie d’environ 5 dollars ou moins pour certaines fleurs individuelles à 100 dollars ou plus pour d’autres. Les événements qui nécessitent des arrangements multiples, comme les mariages, peuvent facilement atteindre 1000 dollars, voire plus.
Au Rwanda, les pépinières de l’entrepreneur Viateur Ndahayo rapportent en moyenne entre 1000 et 50 000 dollars par mois en fonction des marchés qu’il gagne. Un acre d’arabicum, par exemple, peut rapporter jusqu’à 8415 dollars, dont moins d’un quart est consacré à la production, selon certains producteurs, précise-t-on.
Un bon fleuriste doit connaître les différents types de fleurs, leur durée de vie et la manière de les entretenir correctement. Il doit également être compétent en matière de décoration et être capable de créer divers arrangements. Les petits fleuristes, explique-t-on, se tournent généralement vers les fleurs d’été, parce qu’elles sont résistantes aux parasites et aux maladies, et tolèrent diverses conditions de sol, contrairement aux roses, dont la plupart sont cultivées sous serre.
L’arabicum ; l’ammi ; le mobydick ; l’eryngium ; le tuberosa ; l’onis et le claspedia sont quelques-unes des fleurs d’été qui sont populaires auprès des petits exploitants. D’autres variétés comme les Hemerocallis ; Agapanthus blue ; Roystonea palm et Ixora red sont également convoitées.
Quid des autres grands producteurs africains de fleurs
Le Zimbabwe, par exemple ambitionne d’engranger, selon le ministre adjoint de l’Agriculture, Davis Marapira, 200 millions de dollars cette année, à partir de l’exportation de fleurs coupées, contre environ 3,2 millions de dollars en 2015. Afin de réaliser cet objectif, le pays compte développer 1 000 hectares de fermes floricoles, produisant majoritairement des roses.
D’après le ministre, l’essentiel des fleurs coupées sera destiné aux marchés européens. Le pays d’Afrique australe représentait aussi le second plus gros exportateur de fleurs coupées du continent, derrière le Kenya, avec des recettes de l’ordre de 60 millions de dollars, une place désormais occupée par l’Ethiopie.
En 2020/2021 au Rwanda, la production de fleurs a atteint plus d’un million de kilogrammes, soit une augmentation de 58%. Et, les recettes issues de leur exportation étaient de 7.908.050 dollars américains, selon l’entreprise Bella Flowers, spécialisée dans la culture et l’exportation des fleurs. Ici, la production de fleurs ne cesse d’augmenter.
Mais l’agriculture dans le pays (qui représente 1/3 de l’économie nationale et emploie 80% de la population) repose encore très largement sur le café et le thé. Il faut noter que le pays bénéficie d’un avantage naturel énorme dans la production des fleurs, il s’agit du climat, car le Rwanda bénéficie de quatre saisons. Cependant, le premier producteur de fleurs coupées d’Afrique a enregistré une baisse de 27 685 tonnes en 2020 par rapport à l’année précédente, soit moins de 16%.
Afrique : une attractivité naturelle pour la production des fleurs
L’attractivité africaine s’explique par un certain nombre de facteurs. En s’installant, les entrepreneurs transforment des caractéristiques de ces hautes terres tropicales en aménités voire en avantages comparatifs par rapport aux conditions de production européennes.
Au-dessus de 1 700 m dans la plupart des cas et jusqu’à 2 700 m, en situation d’abri par rapport aux flux dominants (versant sous le vent du Mont Kenya, climat d’abri du bassin de Cayembe en Équateur, Rift valley en Éthiopie ou au Kenya), les hautes terres équatoriales offrent, gratuitement, la qualité de la luminosité (56 Klux), la régularité de l’insolation et l’alternance journalière de températures (entre 12° et 19° la nuit et 25° et 30° le jour) requises pour une photosynthèse idéale des rosiers et donc pour la production de masse de roses droites, colorées et aux boutons larges, correspondant aux attentes du marché.
Seul le parfum manque, parce que le gène du parfum est antagoniste de celui de la durée de vie en vase, qualité essentielle à ces roses qui doivent voyager. Les caractéristiques de la tropicalité altitudinale ont donc été converties en aménités productives par des entrepreneurs en quête de sites alternatifs. En outre, les sites choisis ont privilégié les lieux qui offraient la disponibilité d’eau nécessaire à l’irrigation.
Les premiers sites kenyans ont été autour du lac de Naïvasha ; les premiers sites éthiopiens à proximité du lac de Debré Zeit. Désormais, les entrepreneurs ont diversifié les localisations en quittant les berges des lacs pour conquérir d’autres localisations, plus hautes. Cependant, la contrainte de la disponibilité en eau – torrents du Mont Kenya, nappes profondes – demeure et il est difficile de s’en affranchir.
À cette tropicalité, il faut ajouter de relativement bons équipements et infrastructures de transport, notamment aéroportuaires, pour relier directement et rapidement les bassins de production équatoriaux aux marchés. La rose voyage relativement bien et, contrairement à d’autres fleurs moins robustes, possède une durée de vie en vase, critère fondamental de la qualité des fleurs coupées, relativement longue, comprise entre 11 et 17 jours pour les plus résistantes.
L’aéroport de Nairobi, le Jomo Kenyatta International Airport, et celui de Bole à Addis-Abeba sont parmi les plus performants d’Afrique et disposent d’une importante zone fret, orientée notamment vers le transport de produits périssables de contre saison.