L’Afrique continue d’exporter à l’état brut les 2/3 de sa production sans valeur ajoutée et en importe l’équivalent du tiers sous forme de produits finis en termes de café soluble et café moulu.
Ajouter de la valeur à notre café constitue le meilleur moyen le plus sûr de sortir du diktat des marchés boursiers, dont les mécanismes de fixation des prix nous échappent totalement, et d’assurer une rémunération convenable à nos producteurs. Le deal que nous devons sceller ici à Kampala est que cela cesse, que nous cessions d’approvisionner les usines des autres à travers le monde, que nous cessions de consommer notre café transformé par les autres.
Le ministre camerounais du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, portait ainsi la voix de l’Afrique à Kampala en Ouganda, du 8 au 9 août 2023, lors du Sommet du G25 sur le café africain, dont la réflexion portait sur « Transformer le secteur africain du café par la valeur ajoutée ».
Le Cameroun qui soutient l’intégration du café dans la Stratégie africaine des matières premières portée par l’Union Africaine dans le cadre de « l’Agenda 2063 : l’Afrique que nous voulons », qui vise à faire passer l’Afrique d’un simple fournisseur de matières premières pour le monde en un continent producteur de la valeur ajoutée. Un continent qui dispose du plus grand marché au monde à travers la Zlecaf, de femmes dynamiques, capables d’impulser la transformation structurelle de la filière, de 60% de terres arables existant dans le monde.
La fortune économique de la plupart des pays producteurs d’Afrique dépend du café. Ainsi, l’Organisation interafricaine du café (OIAC) est à la tête des efforts visant à traiter les questions liées à l’amélioration de la productivité tout en encourageant la consommation intérieure dans ses États membres et en développant des partenariats pour promouvoir la consommation dans les autres pays africains, dans le cadre de la promotion du commerce intra-africain de l’Union africaine.
Le programme proposé par l’OIAC vise à tirer parti de l’urbanisation croissante en Afrique et de l’intérêt des investisseurs locaux pour les cafés dans les zones urbaines. Cela permettra de libérer l’énorme potentiel du sous-secteur africain du café, d’assurer un marché stable pour le café africain et de contribuer à l’amélioration du niveau de vie dans les communautés rurales.
On estime que cela aura un impact particulier sur les femmes, qui jouent un rôle majeur dans le café et d’autres formes d’agriculture, générant ainsi des revenus accrus pour leurs familles. La promotion de la consommation de café fait partie de la stratégie quinquennale de l’OIAC approuvée par ses membres lors de sa 57e assemblée générale annuelle qui s’est tenue en février 2018 à Grand Bassam en Côte d’Ivoire.
L’agriculture est le pivot économique de la plupart des pays africains et offre un potentiel élevé pour la croissance et la création d’emplois. Le secteur agricole emploie plus de 70% de la main-d’œuvre africaine et représente environ un tiers du PIB du continent. Pourtant, la pauvreté est importante dans les communautés rurales où l’on trouve les producteurs de café. Cela est dû au fait que plus de 70% des démunis du continent vivent dans les communautés rurales et dépendent de l’agriculture pour leur alimentation et la création de richesses.
L’Afrique compte le plus grand nombre de pays producteurs de café
La part de l’Afrique dans la production caféière mondiale a augmenté de 14 % en 2022. C’est ce que vient de révéler un rapport publié par l’Organisation Internationale du Café (OIC) qui prévoit également une hausse de 1,4 % de la production en Afrique en 2023. Il y a une forte demande sur les grains de café dans de nombreux pays africains.
Selon le rapport, la consommation de café en Afrique a augmenté de 2,6 % durant l’année écoulée en 2021-2022. Au cours de cette saison de récolte, le continent africain a consommé 12,87 millions de sacs de café (un sac pèse 60 kg). Un nouveau record pour la région où la consommation est en hausse constante depuis 2017. L’Afrique est le continent qui compte le plus grand nombre de pays producteurs de café. Le rapport révèle que six pays représentent près de 75 % du volume total consommé par le continent africain.
Il s’agit de l’Ethiopie, premier producteur de la rubiaceae (feuilles de café), suivie par l’Algérie, l’Egypte, le Maroc, l’Afrique du Sud et la Tunisie. D’après l’OIC, la dynamique africaine devrait encore se poursuivre durant la saison 2022-2023, dépassant ainsi la barre des 13 millions de sacs.
Cette industrie est essentielle pour de nombreux pays car elle constitue une source majeure de revenus pour plus de 12 millions de ménages et contribue de manière significative aux recettes fiscales d’un certain nombre de ces pays. Le sous-secteur du café en Afrique continuera d’offrir des opportunités de croissance, d’augmentation des revenus et de transformation de la vie des communautés paysannes.
Il offre un grand potentiel pour catalyser le développement du secteur privé, créer des emplois et générer des revenus pour les secteurs public et privé – y compris les planteurs, les transformateurs, les coopératives, les sociétés privées d’exportation, les gouvernements, etc.
L’Afrique doit exploiter pleinement les opportunités existantes dans la transformation de la chaîne de valeur du café africain, en se concentrant à la fois sur les marchés nationaux et régionaux, en faisant la promotion de la demande intérieure et donc de la consommation, ce qui pourrait contribuer à faciliter une croissance à long terme tirée par le café dans les pays membres de l’OIAC.
Le café Robusta est la deuxième variété de café la plus produite, derrière l’Arabica. Alors que certains estiment qu’il n’est pas aussi bon que celui-ci, il reste la meilleure option pour la préparation de l’expresso italien, en raison de sa couleur caractéristique et de sa mousse épaisse et dense. Les grains de café Robusta sont originaires d’Afrique et y sont cultivés depuis des siècles.
Le nom « robusta » vient du mot italien « robusto » qui signifie « fort », car plus résistant que son cousin arabica. Il est souvent considéré comme étant de moins bonne qualité en raison de son goût amer et de son arôme terreux. Il est plus fort en goût et contient deux fois plus de caféine que le café arabica soit 3% en moyenne.
Cependant, il existe des variétés de grains de café de qualité supérieure qui peuvent offrir une expérience gustative unique et hors du commun. En 2020, le café robusta représentait 40% de la production mondiale de café avec 70 millions de sacs de 60 kg. Les principaux producteurs sont le Vietnam, le Brésil, l’Indonésie, l’Ouganda et l’Inde. Ensemble, ces pays représentent plus de 70% de la production mondiale.
Le Vietnam est de loin le plus grand producteur, produisant environ 40% du robusta dans le monde. D’autres pays producteurs incluent la Côte d’Ivoire, la République Démocratique du Congo, le Cameroun, la Tanzanie, la Malaisie, la Thaïlande et le Honduras.
Top 5 des pays producteurs de café robusta
L’Afrique de l’Est est le leader de la production grâce à l’Ouganda. Cette variété représente la grande majorité de sa production avec 80% du volume, le reste étant dédié à l’Arabica. A l’échelle de la production mondiale de robusta, l’Ouganda est le deuxième producteur après le Vietnam.
La nation d’Afrique de l’Est est le huitième producteur de café au monde et le deuxième d’Afrique après l’Éthiopie. Le café robusta ougandais est souvent considéré comme ayant un goût plus doux et plus aromatique que les autres Robustas.
L’Ouganda est inscrit de manière indélébile dans l’histoire du café car il est l’un des pays originel du Robusta. La Côte d’Ivoire : 1,77 million de sacs [de 60 kg] – 22% de la production. En Afrique de l’Ouest, le robusta y est presque exclusivement cultivé, notamment en Côte d’Ivoire avec 20% de la production africaine.
La Côte d’Ivoire fut pendant longtemps l’un des leaders mondiaux de la production de café vert. Après son indépendance en 1960, la production de café a culminé dans les années 1970 lorsqu’elle est devenue le 3ème producteur mondial. Dans les années 80-90, les producteurs ivoiriens ont progressivement délaissé le café au profit du cacao, beaucoup plus rentable, le pays devenant ainsi le premier producteur de cacao.
La République démocratique du Congo : 300 000 sacs [de 60 kg] – 4% de la production. La production en Afrique centrale a connu un déclin depuis plusieurs décennies.
La République démocratique du Congo avec 4% du volume de production est l’un des rares acteurs majeurs dans la région. Le robusta est également cultivé principalement dans les régions du nord-est et du sud-ouest du pays. Le Cameroun : 280 000 sacs [de 60 kg] – 4% de la production.
Avec la RDC, le Cameroun est l’autre acteur de la production de robusta en Afrique centrale. Le Cameroun est également connu pour produire du robusta de qualité. La Tanzanie : 274 000 sacs [de 60 kg] – 3% de la production, ne dédie que 30% de sa production nationale au robusta, le reste étant dédié à la production de café arabica. Sa production représente environ 3% de la production africaine.
Transformer pour de la valeur ajoutée
L’Organisation Internationale du Café (OIC) et de l’Organisation Inter Africaine du Café (OIAC) ont mis en place des initiatives visant à transformer le secteur caféier d’Afrique en une industrie moderne, compétitive et durable qui met l’accent sur la qualité et la productivité, profitable à tous les acteurs et en particulier aux producteurs.
Selon ces organisations, le café africain est appelé à jouer un rôle majeur dans le développement des Etats, si l’on venait à obtenir sur le continent, toute la chaîne de valeurs qu’il est appelé à générer. Malheureusement, l’Afrique continué d’exporter à l’état brut les 2/3 de sa production sans valeur ajoutée et en importe l’équivalent du tiers sous forme de produits finis en termes de café soluble et café moulu.
Il est donc question de revitaliser la filière du café africain pour créer une valeur ajoutée intégrale sur le produit au plan national et continental par la transformation et la consommation domestiques du café et se préparer aux opportunités qu’offrent les divers marchés, notamment celui de la Zone de Libre-Echange Continentale Africaine (ZLECAF).
C’est pour cette raison que l’OIAC, consciente du potentiel énorme à libérer dans le secteur du café africain, a élaboré une nouvelle initiative dénommée « Drink Africa Coffée, Build Africa » ou plus simplement « Prendre le Café Africain, Construire l’Afrique » (DCBA/BOCA). Pour la mise en œuvre de cette initiative louable, l’OIAC a soutenu des projets de création de kiosques à café dans certains pays membres dont le Togo.
Demande croissante et saveurs distinctes
Le café est le deuxième produit le plus échangé au monde après le pétrole. La demande sur les grains de café en Afrique, ainsi que dans le monde entier, devrait augmenter au cours de la prochaine décennie. Le continent africain est connu pour être le berceau du café. Il produit les meilleurs cafés au monde. Les variétés les plus répandues sont le robusta et l’arabica.
De même, ses grains de café ont tendance à être plus fruités. La production africaine de café représente 12 % de la production mondiale totale. L’Ethiopie et l’Ouganda représentent environ 62 % de la production totale du continent.
Des pays comme le Burundi, le Kenya, le Rwanda, Malawi, la Tanzanie, la Zambie et, plus récemment, la République démocratique du Congo ont tous établi des marchés d’exportation.
Le café de chacun de ces pays a ses caractéristiques distinctes, ce qui permet d’offrir une gamme très variée de saveurs. Pour l’Afrique, le café est une culture commerciale majeure parce qu’il est exporté essentiellement dans sa première forme sans aucun processus de fabrication,
explique Samar Al-Bagouri, professeure adjoint au département d’économie à la faculté des études supérieures africaines de l’Université du Caire. Et d’ajouter :
alheureusement, bien que l’Afrique soit le berceau du café et le deuxième continent au monde pour sa culture, il exporte 2/3 de sa production sous forme de matière première et en importe environ 1/3 sous forme de produits fabriqués : café soluble et café moulu.
Durant leur récolte, les grains de café africains subissent un traitement à sec. C’est le moyen le plus ancien de récolter et d’emballer les grains de café qui consiste à nettoyer les grains à la main et à les faire sécher au soleil.
Cette méthode, qui nécessite environ un mois pour que les grains de café soient entièrement prêts pour être expédiés, répond à la demande locale et internationale,
explique Samar Al-Bagouri. Le café kenyan a une saveur distincte, ce qui en fait l’un des plus recherchés au monde. En Ethiopie, environ la moitié de la récolte de grains de café pousse en haute altitude pour créer des saveurs distinctes.
Opportunités et défis
Pilier de nombreuses économies africaines, le café joue un rôle primordial dans le développement socio-économique en Afrique. La production africaine de café rapporte des fonds élevés. L’Ethiopie, qui a produit environ quatre millions de sacs de grains de café en 2022, est le plus grand exportateur africain. Elle est responsable de la récolte et de la distribution de 3% de l’approvisionnement mondial en grains de café.
L’Ouganda est le deuxième exportateur africain avec près de 595 millions de dollars de ventes par an. De façon générale, la vente et la culture de grains de café sont rentables pour les acheteurs nationaux et internationaux.
Cependant, selon l’Organisation interafricaine du café, les producteurs africains ne reçoivent que moins de 5 % de la valeur totale mondiale, malgré la validité des terres africaines pour la culture du café. « Les coûts du transport sont élevés et il faut transporter les grains de café des fermes locales aux acheteurs intéressés », explique Samar Al-Bagouri.
En Afrique, où les prix sont bas mais raisonnables, le café est un moyen de subsistance pour les agriculteurs locaux, soit une dizaine de millions de personnes qui travaillent dans le secteur. Une grande partie sont des femmes.
En 2022, l’Organisation internationale du café a signalé qu’environ 80 % du travail dans la production de café sont effectués par des femmes, bien que ce chiffre puisse varier selon les pays et les régions. Toutefois, les agriculteurs locaux gagnent généralement moins d’un dollar par jour pour ce travail acharné.
L’enjeu climatique
Sécheresse et hausse de températures, le réchauffement climatique menace l’industrie du café en Afrique. Car les grains de café sont très sensibles aux variations des températures. Selon les estimations, d’ici 2050, la superficie des terrains disponibles pour cultiver le café pourrait diminuer de moitié, alors que 60 % des variétés de café pourraient disparaître à cause des changements climatiques. Le café Arabica est l’une des espèces les plus menacées.
Toutefois, malgré les effets climatiques, les grains de café africains restent les meilleurs en ce qui a trait à la qualité. La plupart des grains produits sont biologiques et n’utilisent aucun produit agrochimique ou engrais pour augmenter la production globale. Des experts s’attendent à une bonne récolte de café pendant les années à venir. A mesure que la demande sur le café augmente, la production africaine de café augmente aussi pour répondre à cette demande.
De nouvelles opportunités pour le café africain
Les importations de robusta dans la CEE augmentent régulièrement depuis 1985 et représentent actuellement 36 % des achats grâce notamment à un bond de la consommation en Espagne. Cette constatation, mentionnée dans un rapport du ministère de la Coopération sur « La Compétitivité des cafés africains », qui vient de paraître et que cite le journal « les Echos », tend à démontrer que la position des producteurs africains sur le marché international n’est pas compromise.
La crise que connaît le marché du café, dont les cours ont pratiquement chuté de moitié par rapport à ceux des années cinquante, et ce, malgré un marché déficitaire depuis 1989, a contraint à une réorganisation de la filière café africaine. Cette remise en cause des institutions traditionnelles, qui s’étaient révélées être « un facteur de blocage pour la compétitivité du café africain », selon les auteurs du rapport, doit « être considérée comme une opportunité » pour les producteurs.
Le document met en effet en avant les nombreux atouts dont disposent la dizaine de pays d’Afrique qui exportent du café: leur pratique de la caféiculture, des réserves de terres encore abondantes, une main-d’œuvre peu onéreuse.
L’échec, à la fin de l’hiver dernier, de la renégociation de l’accord international du café a en effet favorisé le mouvement de désétatisation des filières de production et conduit à s’interroger sur la crédibilité des engagements de stockage et de rétention pris par les producteurs, en septembre dernier, pour soutenir les cours.
Un premier résultat positif pour les producteurs a déjà été enregistré puisque le robusta, qui avait chuté à 46 cents la livre en mars, est remonté aux environs de 56 cents actuellement soit un redressement de près de 20 %.
Toutefois, s’inquiète l’étude, l’effacement des États devrait renforcer le pouvoir économique des grandes firmes de négoce et de l’industrie et les amener à exercer un contrôle accru sur les filières nationales de production.
Car, concluent les auteurs, ces firmes devront se substituer aux institutions défuntes qui garantissaient la régularité de l’approvisionnement du marché international grâce au stockage, au financement de la commercialisation ou à son exécution et à la qualité du produit.