Ad image

Éducation : quel savoir pour 2,5 milliards d’Africains en 2050 ?

Ces dix dernières années, les dépenses réelles en matière d’éducation ont augmenté de 6% en moyenne par an en Afrique subsaharienne d’après le rapport des travaux de l’Institut de statistique de l’Unesco (Isu) visant à améliorer la production et l’utilisation des données financières liées à l’éducation.

15 Min Lecture

Généralement, on part de l’idée reçue que les moyens mis en œuvre sont consacrés à ouvrir la scolarisation à une plus large population. Néanmoins, des statistiques récentes montrent que beaucoup de pays ont également effectué des investissements importants afin d’améliorer la qualité de leur enseignement. Au Burundi et au Mozambique par exemple, les dépenses ont ainsi augmenté en moyenne de 12 % chaque année. Parmi les 26 pays disposant de données, un seul d’entre eux, la République centrafricaine, a réduit ses dépenses d’éducation.

Grâce à ces investissements, le secteur de l’éducation s’est remarquablement développé en Afrique subsaharienne. Le nombre d’enfants scolarisés dans l’enseignement primaire a augmenté de 48 % entre 2000 et 2008 où il est passé de 87 millions à 129 millions à en croire le rapport des travaux de l’Institut de statistique de l’Unesco (Isu). Les taux de scolarisation dans l’enseignement pré primaire, secondaire et supérieur ont eux aussi connu une croissance de plus de 60 % pendant la même période.

En effet, le Forum mondial sur l’éducation qui s’est tenu à Dakar au Sénégal en 2000, a été un événement d’une importance fondamentale. Une opportunité, pour laquelle la communauté internationale avait officiellement pris l’engagement « qu’aucun pays ne sera entravé dans ses efforts pour réaliser l’éducation pour tous (Ept) en raison d’un manque de ressources » (Forum Éducation pour tous, 2000). Depuis la tenue de ce forum, les gouvernements nationaux, les organisations internationales et les parties prenantes cherchent des solutions pour trouver les ressources nécessaires à la réalisation des objectifs de l’Éducation pour tous.

Les besoins pédagogiques de l’Afrique

L’Afrique compte aujourd’hui 1,3 milliard d’habitants, soit 16 % de la population mondiale. D’après les prévisions des Nations Unies, ce chiffre sera multiplié par deux d’ici 2050. D’ici la fin du siècle, sur les 3,8 milliards d’individus qui devraient venir grossir les rangs de la population mondiale, 3,2 milliards seront africains. De ce fait, les habitants de l’Afrique représenteront alors 39 % de la population mondiale. Cette hausse de la démographie est adossée aux progrès réalisés dans le domaine de la santé publique, améliorant au passage l’espérance de vie des populations qui est aujourd’hui de 60 ans, contrairement à celle d’un Africain né en 1955 qui n’était que de 37 ans.

Mais cette croissance démographique pourrait bien évidemment exacerber les problèmes actuels parmi lesquels l’éducation est l’un des domaines où l’Afrique nécessite un fort besoin de progression.  À noter que le secteur éducatif en Afrique subsaharienne est encore sous développé, avec moins d’une femme africaine sur cinq qui va à l’école. Ainsi, la moitié des enfants à travers le monde qui ne reçoivent aucune éducation sont Africains, soit 30 millions d’enfants qui ne fréquentent pas les bancs d’une école.

En réalité, l’éducation qui n’est que l’un des prérequis du développement humain, joue néanmoins un rôle clé dans la gestion du changement dans un pays, notamment en Afrique où le taux de scolarisation est encore moins important. Depuis le début des années 2000, les pays africains déploient leurs efforts pour améliorer l’accès à l’éducation et ont obtenu des résultats spectaculaires en ce sens. Pour cela, la proportion d’enfants non scolarisés parmi ceux en âge de fréquenter l’école primaire a été divisée par deux, passant de 35 % en 2000 à 17 % en 2019, d’après le rapport de collaboration entre l’Unicef et la Commission de l’Union africaine.

La proportion d’enfants non scolarisés parmi ceux en âge de fréquenter le premier cycle du secondaire est passée de 43 % à 33 % au cours des deux dernières décennies ; chez les enfants en âge d’être scolarisés dans le deuxième cycle du secondaire, ce chiffre est passé de 63 à 53 %. Par ailleurs, de nombreux enfants quittent l’école sans avoir achevé un cycle d’études. Ainsi, dans une formation, un enfant sur trois n’achève pas le cycle primaire. Dans l’enseignement secondaire, seuls 41 % des enfants d’une cohorte achèvent le premier cycle, et 23 % seulement achèvent le deuxième cycle. En 2019, on comptait environ 105 millions d’enfants non scolarisés parmi ceux en âge de fréquenter le primaire et le secondaire en Afrique, soit 41 % du total mondial.

Défis majeurs du développement de l’éducation

L’éducation est un levier fondamental pour permettre à l’Afrique de développer son capital humain. Les investissements en faveur de l’éducation contribuent à briser les cycles intergénérationnels de la pauvreté et à renforcer le développement socioéconomique. Ils peuvent en outre favoriser l’émergence d’une main d’œuvre qualifiée et employable, dont les savoir-faire et les compétences sont en adéquation avec la demande des marchés du travail. Vu cette approche, l’éducation contribue à l’autonomisation des personnes et permet de favoriser la paix au sein des communautés, d’accroître la participation citoyenne et de renforcer les démocraties.

Ce capital humain représente un potentiel considérable pour les pays africains, mais c’est aujourd’hui et maintenant que des efforts doivent être faits pour investir dans l’éducation et la formation des enfants et des jeunes. C’est à cette condition seulement que les pays africains pourront récolter pendant de nombreuses années les fruits de ce « dividende démographique », c’est-à-dire une hausse de la productivité économique observée lorsque la population active est plus importante que le nombre de personnes à charge.

Dès l’Antiquité, Platon connaissait l’importance du savoir et de l’apprentissage. Ce philosophe affirmait déjà qu’un homme qui néglige l’éducation « traverse la vie d’un pas chancelant », or l’éducation joue un rôle crucial dans le développement économique d’une société. La valeur du capital humain, c’est-à-dire sa part dans la richesse totale, est de 62 %, soit quatre fois le capital acquis et quinze fois le capital à la naissance. À l’échelle de la planète, l’ensemble des acteurs qui interviennent dans le secteur éducatif (pouvoirs publics, secteur privé, ménages, individus) dépensent annuellement plus de 5 600 milliards de dollars pour l’éducation et la formation de sa population.

Les pays consacrent 5 % de leur Produit intérieur brut (Pib) à l’éducation, où 20 % de leur budget national, et 5 % environ de la population active travaille dans ce secteur. D’un autre point de vue, le rendement des études sur le marché du travail est en essor, puisqu’il a augmenté de plus de 20 % en Afrique et de plus de 14 % en Asie de l’Est/Pacifique. Et il faut surtout signaler une évolution qui constitue la mutation majeure de notre époque, surtout que, le taux de rendement des études supérieures est aujourd’hui le plus élevé.

Développer les opportunités tout en veillant à l’équité

Dans la plupart des pays du monde, le gouvernement est le principal bailleur de fonds de l’éducation. Le raisonnement sur lequel tout le monde s’accorde généralement est qu’une intervention publique dans l’éducation apporte des bénéfices externes importants pour la société. Dans le domaine du développement de l’éducation, l’UA a instauré la décennie de l’éducation pour l’Afrique. De ce fait, le flux externe d’aide au secteur éducatif dans la région a progressé de 1,1 milliard $ US courants en 2002 à 2,6 milliards $ US en 2008 grâce à une série de programmes de développement internationaux.

On note toutefois que certains pays d’Afrique subsaharienne risquent une dépendance trop poussée envers l’aide externe. Parmi les pays disposant de données, le Libéria, le Mali, le Rwanda et la Zambie semblent avoir financé plus de 50 % de leurs budgets d’éducation avec des sources externes en 2008. Une croissance rapide de la scolarisation a été observée, notamment pendant les années 2000, grâce aux efforts internationaux accrus dans le cadre des Objectifs du millénaire pour le développement (Omd) et de l’Éducation pour tous (Ept).

Dans les écoles primaires, le nombre d’élèves est passé de 87 à 129 millions entre 2000 et 2008 et le Tbs dans l’enseignement primaire a progressé de 82,2 % à 101,6 %. Cette croissance rapide de la scolarisation a aussi été soutenue par un engagement politique. Un des changements de politique qui a eu le plus d’impact sur le développement de l’éducation a été la suppression des frais de scolarité, appliquée dans les années 1990, notamment au Cameroun, en Éthiopie, au Ghana, au Malawi, en Ouganda et dans les années 2000 au Bénin, au Burundi, au Lesotho, au Libéria, au Mozambique, au Rwanda, en Sierra Leone, en République-Unie de Tanzanie et en Zambie.

Les pays africains doivent améliorer la qualité de leur système éducatif, viser l’excellence et développer les opportunités en s’attachant à l’efficacité et à l’équité afin que les jeunes issus d’un milieu défavorisé puissent eux aussi accéder aux études et obtenir des diplômes. Si les rendements de l’éducation sont en moyenne élevés (Psacharopoulos et Patrinos, 2002 [a]), ils peuvent néanmoins se révéler variables (Montenegro et Patrinos, 2014 [a]). Il est donc impératif d’améliorer les informations accessibles et de renforcer les réseaux de soutien afin que les étudiants moins bons puissent terminer un cursus d’enseignement supérieur.

Cependant, les familles et les élèves issus de milieux défavorisés en profiteront également, car ils surestiment dans la majorité des cas les bénéfices de l’éducation et ils en sous-estiment les coûts. L’éducation est de toute évidence l’un des instruments les plus puissants pour lutter contre la pauvreté et les inégalités, ainsi que pour jeter les bases d’une croissance économique solide. Il serait judicieux pour l’Afrique d’investir davantage dans ce secteur pour mieux encadrer ses 1,3 milliards d’individus aujourd’hui et 2,5 milliards d’ici 2050, afin de leur offrir une éducation de qualité.

Les dépenses en manuels scolaires et matériels d’apprentissage

Elles constituent un autre élément clé pour l’éducation et la formation d’un individu. Ainsi, les rapports relatifs aux dépenses en matériel d’apprentissage donnent des résultats très variés d’un pays à l’autre. Le Tchad et la Guinée dépensent plus de 14 % de leurs budgets pour l’enseignement primaire dans du matériel d’enseignement, contre moins de 2 % à Madagascar, en Ouganda et au Togo. La Guinée et le Tchad dépensent respectivement 11,3 $ dans la Parité de pouvoir d’achat (Ppa) et 20,7 $ Ppa par élève du primaire, alors que les Comores dépensent le montant le plus élevé par élève soit 33 $ Ppa et le Togo le moins élevé (0,7 $ Ppa).

Il est possible que des anomalies au niveau des rapports eux-mêmes rendent cet indicateur difficile à évaluer selon les données du rapport statistique de l’Unesco (Isu). Ledit rapport précise que, la part des enseignants qualifiés dans l’enseignement primaire est supérieure à 95 % au Botswana, en Côte d’Ivoire, au Kenya, à Maurice, en Namibie, au Niger, aux Seychelles et en Tanzanie. La moyenne de 33 pays d’Afrique subsaharienne est de 86,1 %. Le Chapitre 3 du même rapport a déjà évoqué le fait que les qualifications des enseignants semblent bien avoir baissé car davantage d’enseignants ont été engagés sur une base contractuelle dans le but de faire face au nombre croissant d’élèves.

Favoriser l’employabilité jeunes

Environ 100 millions de jeunes d’ici 2030, entreront sur le marché du travail en Afrique. Cela représente chaque année plus de 10 millions de jeunes demandeurs d’emploi à travers le continent. Cette déferlante démographique peut devenir une opportunité si le continent parvient à relever le défi de l’employabilité. Faute de compétences adaptées, les jeunes représentent jusqu’à 60 % des chômeurs africains.

Pour répondre à la demande économique et bâtir le futur des jeunes, il est urgent de renforcer l’efficacité des systèmes de formation professionnelle en privilégiant les approches partenariales. Alors que le développement des compétences techniques   et   professionnelles   occupe   une   place importante dans l’agenda Éducation 2030 des Nations Unies, les dispositifs africains d’enseignement et de formation techniques et professionnels (Eftp) quant à eux, ne sont pas encore à la hauteur des enjeux.

Pour en savoir plus...

Suivez-nous sur nos chaînes   chaîne Telegram Invest-Timechaîne WhatsApp Invest-Time

Laissez un commentaire

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *