Une semaine après le vote de la liste « Gecam pour une fondation en béton » pour présider les destinées du Groupement des entreprises du Cameroun (Gecam), le tout premier président de cette nouvelle centrale patronale créée fin 2023, Célestin Tawamba a dévoilé ses priorités. C’était au cours d’une conférence de presse, vendredi, 19 avril au siège de l’organisation patronale à Douala. La conférence a été précédée par la tenue de la toute première session du conseil d’administration du Gecam. Une session à laquelle ont pris part, certains en présentiel et d’autres en vidéoconférence, tous les 18 membres que compte actuellement le conseil d’administration en attendant les membres à copter.
Le dialogue public-privé occupe une place de choix dans le programme de l’actuel exécutif du Gecam. Le Cameroon Business Forum (CBF ), qui est un des outils clés de ce dialogue, n’a pas produit les résultats escomptés en dix années d’existence. Célestin Tawamba et son équipe veulent donner de nouvelles orientations à ce rendez-vous du monde des affaires pour le rendre plus efficace. Cette refondation, il l’a résumée comme suit : “repenser le dialogue public-privé, mettre en place des éléments, des matrices dans lesquelles il y a un certain nombre de sujets concernant les entreprises », ce dernier aspect devant être le « point d’orgue » de ce rendez-vous qui se veut annuel.
Pour une justice fiscale
L’autre cheval de bataille c’est la fiscalité appliquée aux entreprises notamment les impôts prélevés sur le chiffre d’affaires plutôt que sur le revenu comme l’a toujours souhaité le patronat. Certes, la pression fiscale demeure relativement faible au Cameroun (12,5%), comparée à la moyenne africaine qui est d’environ 17%. Toutefois, explique la fiscaliste Laure Kenmogne, membre du conseil d’administration du Gecam,
lorsqu’on dit que la pression fiscale est forte, c’est parce qu’elle est concentrée sur les mêmes entreprises. Nous voulons en fait aider l’Etat à élargir l’assiette fiscale pour que ce ne soit pas toujours les mêmes entreprises qui paient, pour que ce soit une fiscalité plus juste, plus équitable, qui soit en réalité distillée, supportée par tout le monde, c’est-à-dire aussi bien les petits, les moyens, les très grands, que tout le monde paie.
La solution selon l’équipe Tawamba, c’est d’encourager les acteurs du secteur informel à migrer progressivement vers le secteur formel, ce qui aura justement pour effet l’élargissement de l’assiette fiscale.
Notre bataille, aujourd’hui, c’est d’amener progressivement l’administration à accepter qu’on doit revoir ce système d’imposition qui présente les gènes de cette pression fiscale. Donc concrètement, la bataille c’est changer ce système fiscal pour aller vers une fiscalité axée sur le revenu et pas sur le chiffre d’affaires de manière à avoir un élargissement de l’assiette,
a poursuivi la présidente directrice générale (PDG) du groupe Juritax Conseil. Le développement agricole est une autre préoccupation du Gecam. Cependant, l’atteinte de cet objectif bute à l’épineuse question foncière. De petites avancées ont été réalisées à travers des mesures incitatives contenues dans la loi de finances 2023, adoptées sur proposition du patronat. Toutefois, de nombreux défis restent à relever pour rendre ce secteur encore plus attractif pour les investisseurs.
Défendre les PME
Mais la bataille la plus décisive demeure celle des petites et moyennes entreprises (PME), qui sont majoritaires (99% du tissu économique) mais toujours vulnérables. Beaucoup d’entre elles périclitent au cours de leurs cinq premières années de fonctionnement. Pendant qu’elles sont encore en activité, elles peinent à rembourser les montants empruntés. Or “quand elles ne remboursent pas, ce n’est pas forcément parce qu’elles ne veulent pas », précise Perrial Jean Nyodog, un autre membre du conseil d’administration du Gecam.
Depuis fin 2023, les PME et PMI (petites et moyennes industries) font désormais route commune avec les grandes entreprises, à la faveur de la fusion Gicam-Ecam. Cette fusion-création, dénoncée par certains membres du défunt Gicam (Groupement inter patronal du Cameroun) favorables plutôt à la fusion-absorption, avait divisé le patronat, et il appartient au camp des vainqueurs, qui n’est autre que celui de Célestin Tawamba, de prouver que sa vision n’était pas erronée et qu’il avait de bonnes raisons de plaider pour un patronat unifié regroupant des membres solidaires les uns vis-à-vis des autres. Comme l’a si bien relevé le vice-président du Gecam, Protais Ayangma :
On ne s’est pas beaucoup occupé d’elles (les PME) jusqu’à présent et, au niveau du Gecam, nous avons pris des dispositions pour mettre en place des outils pour mieux adresser ce problème. Donc c’est un problème très important pour nous. C’est un peu la révolution que nous voulons faire et on sera certainement évalués à notre capacité à adresser le problème des PME.