La transition mondiale vers les énergies propres et la décarbonisation rapide ont augmenté de façon exponentielle la demande de véhicules électriques ainsi que l’investissement dans les systèmes de stockage alimentés par batterie. En 2023, la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA) a participé à une cérémonie de signature ratifiant un accord-cadre pour la création de Zones économiques spéciales (ZES).
L’accord prévoit la production de BVE (batterie et de véhicules électriques) en RDC et en République de Zambie. En tant que producteurs de plus de 70% du cobalt mondial et de 10% du cuivre mondial, les experts s’accordent à dire que la RDC et la Zambie pourraient passer du statut de pays exportateurs de matières premières à celui de fabricants et fournisseurs régionaux et mondiaux de précurseurs de batteries (tels que l’oxyde de nickel, de manganèse ou de cobalt).
C’est une étape importante pour garantir la mise en place des bonnes politiques pour que la région puisse bénéficier du boom des minéraux verts
affirmait Antonio Pedro, Secrétaire exécutif par intérim de la CEA. Antonio Pedro a de plus souligné l’importance de l’accord dans l’ouverture de la région à une industrialisation durable et à une diversification économique, dans le contexte de l’opérationnalisation de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf).
Le partenaire financier de ce projet, Afreximbank et la CEA, partenaire technique, dirigeront la création d’une société d’exploitation en consortium avec des investisseurs (publics et privés) de la RD Congo et de la Zambie, ainsi que des investisseurs internationaux tels que la filiale de fonds d’impact d’Afreximbank, le Fonds pour le développement des exportations en Afrique (FEDA). Cette structure développera des ZES dédiées à la production de précurseurs de batteries et de véhicules électriques dans les deux pays. De son côté, le développeur d’infrastructures ARISE Integrate Industrial Platform (ARISE IIP) a été sélectionné comme consultant technique pour mener l’étude de préfaisabilité en vue de l’établissement de ces ZES.
Capter davantage de valeur
Le projet déploie une technologie de véhicules électriques bien établie et éprouvée qui permettra aux deux pays d’exploiter leurs ressources minérales à grande échelle, expliquent ses promoteurs. Il a pour ambition d’accélérer la fabrication de produits à valeur ajoutée avant l’exportation. Ce qui permettra de capter davantage de valeur. Le projet entraînera une nouvelle demande d’ingénieurs qualifiés disposant d’une expertise technique. Une aubaine pour le marché local du travail.
On inscrit ce projet dans un espace hors taxe qui est considéré comme une zone sous douane parce que nous avons connu beaucoup d’investisseurs qui plient bagage car ils estiment faire l’objet de beaucoup de tracasseries,
a déclaré le ministre congolais de l’Industrie.
Les isoler dans cet espace que les gouvernements congolais et zambien ont créé permet que l’investissement soit beaucoup plus compétitif, avec des coûts réduits,
poursuit le ministre.
Si on capte 10% de ce marché, cela nous fait 700 milliards de dollars. Il appartient à nous, Africains, de monter des stratégies pour capter ce marché,
ajoute-t-il.
Rappelons que d’ici 2050, la production de minéraux tels que le cobalt, le graphite et le lithium pourrait augmenter de près de 500 pour cent, pour déployer et stocker les énergies éolienne, solaire et géothermique afin de relever le défi de l’objectif carbone net-zéro dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique, selon un rapport de Natural Resource Governance Institute (NRGI).
Afreximbank au cœur de la transition énergétique
La RD Congo et la Zambie sont bien placées pour s’imposer dans le secteur stratégique des véhicules électriques. Les deux pays disposent des ressources nécessaires à la production de minerais pour batteries.
Cet accord témoigne d’un engagement fort des gouvernements des différentes parties, ainsi que d’autres partenaires, pour promouvoir le développement inclusif de la chaîne de valeur des véhicules électriques à batterie, rendant également la RD Congo et la Zambie des destinations d’investissement compétitives à l’échelle mondiale,
pense Oluranti Doherty, directrice du développement des exportations d’Afreximbank. Les équipes d’Afreximbank, poursuit-elle, sont « fermement convaincues » que les parcs industriels et les Zones économiques spéciales sont des outils essentiels que le continent peut déployer pour accélérer le développement de son infrastructure industrielle, promouvoir le commerce intra-africain, accélérer la mise en œuvre du libre-échange (Zlecaf) et faciliter le développement des exportations.
Cette intervention démontre également l’engagement d’Afreximbank à promouvoir des solutions de financement du climat qui réduisent l’empreinte carbone – en alignement avec les tendances mondiales de décarbonisation et un récit panafricain visant à encourager une transition énergétique juste, durable et responsable,
précise-t-elle.
La transition mondiale vers l’énergie verte et la décarbonisation rapide ont augmenté de façon exponentielle la demande de véhicules électriques ainsi que l’investissement dans les systèmes de stockage alimentés par batterie. Pour Afreximbank, cette intervention s’ajoute aux références de l’institution en matière de financement climatique, l’établissant comme un financier de premier plan pour les projets de transition énergétique qui développent la sophistication industrielle des principaux marchés africains.
Les ZES, levier de l’industrialisation
De manière générale, les ZES constituent des zones géographiques délimitées à l’intérieur des frontières d’un pays, où les règles du monde des affaires sont différentes de celles qui prévalent sur le reste du territoire. Elles sont généralement plus libérales.
Elles paraissent donc particulièrement attrayantes dans les contextes fragiles qui se caractérisent par un environnement des affaires particulièrement difficile. Précisément, la plupart des zones apportent aux investisseurs quatre avantages principaux dont ils ne bénéficieraient pas normalement dans l’environnement national.
Il s’agit d’infrastructures, du régime réglementaire et administratif amélioré, du régime douanier spécial et du régime fiscal attractif. D’après une étude commanditée par le Département d’appui à la transition (ORTS) de la BAD, et effectuée par Eunomix, les ZES ont pour objectif d’attirer les investissements directs étrangers, établir des pôles de croissance, encourager la participation du secteur privé, soutenir les PME, catalyser le développement plus global du secteur privé en se concentrant sur des sous-secteurs ou des projets compétitifs, favoriser la diversification économique, gagner un plus grand soutien multilatéral, favoriser la collaboration institutionnelle et la cohérence des politiques.
Les ZES qui vont être créés pour la construction des batteries et véhicules électriques en RDC et en Zambie, permettront à ces pays d’Afrique de s’industrialiser et par ricochet, de produire une valeur ajoutée consistante sur leurs ressources minières. Précisons que la part de l’Afrique en termes de performance se situe à hauteur d’environ 2% seulement de la valeur ajoutée manufacturière mondiale,
indique Jean Luc Mastaki, directeur du bureau sous régional pour l’Afrique centrale de la CEA.
Les Zones économiques spéciales ne sont pas un concept nouveau pour ceux qui connaissent les théories économiques. Les anciennes ZES étaient nationales, or nous sommes en train d’encourager les pays à aller dans une logique transnationale. C’est le cas des ZES sur les batteries électriques que nous sommes en train d’accompagner entre la RDC et la Zambie, afin que les deux pays se mettent ensemble pour travailler. Cela résout un certain nombre de problèmes et attire mieux les investisseurs,
ajoute Jean Luc Mastaki.
Les véhicules électriques pourront rapporter 1,39 billion de dollars d’ici 2029
La taille du marché mondial des véhicules électriques est estimée à 0,67 milliards de dollars en 2024 et devrait atteindre 1,39 billion de dollars d’ici 2029, avec une croissance de 15,71% au cours de la période de prévision (2024-2029), selon Modor Intelligence, une société d’étude de marchés.
La RDC représente environ 70% de l’offre mondiale de cobalt et 88% des exportations de cobalt. Les deux pays contribuent collectivement à 11% de l’offre mondiale de cuivre. L’exploitation minière est également un secteur essentiel pour ces deux nations. Elle représente 70% des devises de la Zambie, tandis que le cobalt représente 26 % des exportations de la RDC. La transformation locale de ces précieux minéraux permettra de booster considérablement l’économie de ces pays.