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Afrique : levée des visas, une opportunité pour booster les affaires et l’intégration régionale

Les barrières administratives, notamment les restrictions de visas, freinent les échanges et limitent les opportunités d’affaires entre pays africains. Aujourd’hui, la tendance à la levée des visas dans certains pays africains marque une avancée notable. Cette politique, intégrée à la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), pourrait transformer le continent en stimulant les échanges commerciaux, le tourisme et les investissements. 

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L’effectivité de la libre circulation des personnes à travers les frontières africaines est l’un des grands défis de développement du continent. C’est l’un des projets phares de l’Agenda 2063 de l’Union africaine. Certains pays africains se démarquent déjà par leur politique avant-gardiste en matière de suppression des visas. Le Rwanda, depuis 2013, autorise l’entrée sans ou avec visa à l’arrivée pour tous les africains.

Cette politique a non seulement renforcé l’attractivité du pays, mais a également contribué à une augmentation de 25% des revenus touristiques entre 2017 et 2020, selon un rapport de la Commission Economique pour l’Afrique (CEA). Kigali, devenue un hub économique, attire des entrepreneurs de toute l’Afrique grâce à sa facilité d’accès et son environnement d’affaires favorable. 

Les Seychelles, quant à elles, offrent un accès sans visa à tous les citoyens du monde. Cette stratégie a positionné l’archipel comme l’une des destinations touristiques les plus prisées du continent, favorisant la création d’emplois et générant des revenus significatifs dans les secteurs du tourisme et des services.  En 2018, le Bénin a rejoint les Seychelles dans le classement  et est devenu le deuxième pays africain et premier francophone n’exigeant aucun visa aux voyageurs africains.

Le président Talon a pris cette décision en janvier 2017. Elle concerne les séjours d’une durée maximale de 90 jours. Cette ouverture en matière de visa s’inscrit dans une politique de développement du tourisme dans le pays. Dans le classement 2020, la Gambie a rejoint le podium en devenant le 3e pays exonérant les ressortissants africains de visas. Une décision prise en septembre 2019 par le gouvernement gambien avec pour objectif de relancer le tourisme après le Covid en 2019.

Une politique qui porte ses fruits en 2020 puisque la Gambie figurait parmi les 20 pays au monde avec la plus forte croissance de la part du secteur du tourisme dans le PIB, avec notamment 18% de l’économie du pays et autant en termes de nombre d’emplois. Dans la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), le passeport régional facilite les déplacements entre le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi, la Tanzanie et le Soudan du Sud.

 Ce mécanisme a permis d’accroître les échanges commerciaux et les collaborations transfrontalières. En 2022, Selon un rapport de la CEA, les échanges intra-CAE ont représenté environ 20% du commerce total de la région, un chiffre bien supérieur à la moyenne africaine de 16%. 

Un levier pour les échanges commerciaux et les investissements 

La levée des visas joue donc un rôle central dans l’augmentation des échanges commerciaux intra-africains. La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), qui ambitionne de créer le plus grand marché unique au monde, pourrait générer 450 milliards de dollars de revenus supplémentaires d’ici 2035, selon la Banque mondiale. Cette croissance repose en grande partie sur la fluidité des déplacements humains, essentielle pour connecter les acteurs économiques. 

Les politiques de l’Union africaine soutiennent la libéralisation du commerce intracontinental, des investissements et de la circulation des personnes, afin de promouvoir le développement économique, social et politique du continent. Le continent a progressé sur les aspects de l’Accord de libre-échange continental africain qui traitent du commerce et de l’investissement. Il n’y a pas eu beaucoup de progrès en ce qui concerne la libre circulation des personnes. Pourtant, la réussite de l’accord commercial passe par une plus grande liberté de circulation des personnes.

Pour mesurer le degré d’ouverture des pays africains envers les ressortissants des autres pays du continent, la Banque Africaine de Développement publie chaque année depuis 2016 son Indice d’ouverture sur les visas en Afrique (AVOI).  En 2024, les données sur les mobilités intra-africaines sont stables par rapport à l’année précédente. Trois types de critères sont pris en compte pour construire l’indice d’ouverture d’un pays africain envers un autre : la demande d’un visa avant le voyage ; la demande d’un visa à l’arrivée ; l’exemption de visa.

 On apprend que pour 47% des voyages internes à l’Afrique, les africains ont besoin d’un visa avant de voyager, contre 46% en 2023. Pour les voyages avec demande de visa, une fois arrivé dans le pays, l’estimation est de 25% du total des déplacements intra-africains contre 26% en 2023. Enfin, l’exemption de visa concerne 28% des voyageurs africains en 2024.

Une politique en faveur de l’intégration africaine

Le Ghana et le Cap-Vert, avec leur politique de suppression ou d’assouplissement des visas, sont devenus des destinations prisées pour les investisseurs et les touristes africains. Par exemple, au Ghana, la simplification des formalités d’entrée pour les citoyens de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a favorisé une hausse des échanges régionaux et attiré des investissements étrangers dans les secteurs des infrastructures et de l’énergie. 

Jusqu’à l’année précédente, le Ghana exemptait de visas les ressortissants de 26 pays africains. Si à travers l’exemption de visa aux africains, le pays veut développer son industrie du tourisme, la dimension panafricaine est sans doute un facteur non négligeable. À cet égard, le Ghana mène une politique singulière de rapatriement de descendants d’africains à l’échelle globale, notamment en direction des États-Unis. Faisant du Ghana, une nouvelle patrie pour des Afro-descendants en quête d’une citoyenneté africaine.

L’impact économique de la levée des visas ne se limite pas aux revenus directs issus des échanges ou du tourisme. Selon l’Union africaine, cette mesure pourrait ajouter jusqu’à 1,5% de croissance au PIB annuel du continent. De plus, le commerce intra-africain pourrait atteindre 52,3% d’ici 2030, si les politiques de mobilité accompagnent la suppression des barrières tarifaires. 

Les avancées technologiques, comme le e-visa au Cameroun, illustrent comment l’Afrique peut surmonter les obstacles administratifs. En six mois, ce système a généré près de 46 millions de dollars (29 milliards de FCFA)  et facilité l’entrée de milliers de visiteurs, d’après le ministre des Relations extérieures (Minrex), Le Jeune Mbella Mbella. Cette initiative pourrait être adoptée à plus grande échelle pour simplifier les déplacements, tout en renforçant la sécurité. 

Défis et perspectives

Malgré ces progrès, des défis subsistent. La disparité des politiques migratoires, les préoccupations sécuritaires et le manque d’infrastructures de transport freinent la mise en œuvre généralisée de la libre circulation. Le Maroc, par exemple, combine accords bilatéraux et investissements dans les infrastructures pour faciliter les déplacements, tout en maintenant un haut niveau de contrôle. 

L’harmonisation des politiques migratoires au niveau continental sera essentielle pour maximiser l’impact de la levée des visas. L’expérience de l’Europe, avec l’espace Schengen, montre que la libre circulation nécessite des cadres juridiques solides, et une coopération transfrontalière accrue.  La levée des visas en Afrique est bien plus qu’une politique symbolique. C’est un véritable levier pour dynamiser l’économie, renforcer les échanges régionaux et attirer les investissements.

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