Les ambitions de la Côte d’Ivoire pour 2030 sont désormais claires : transformer 50% de sa production de noix de cajou. La production ivoirienne d’anacarde est passée de 500 000 tonnes en 2013 à 1 225 935 de tonnes en 2023. Un chiffre qui place le pays au premier rang des producteurs d’anacarde dans le monde. Avec cette production, Abidjan représente 40% de l’offre mondiale d’anacarde. Ces chiffres ont été rendus publics par Adama Coulibaly, alors Directeur général du Conseil du coton et de l’anacarde. C’était à l’occasion de la tribune hebdomadaire du Centre d’information et de Communication gouvernementale (CICG), dénommé « Tout savoir sur », le 4 juin 2024 à Abidjan. Cette croissance est portée par les réformes de 2013 relatives à la filière coton anacarde.
Le chantier de la transformation
Pour atteindre cet objectif, Abidjan s’est lancée dans la construction de bon nombre d’unités de transformation locales. En 2016, le pays a transformé localement 6,22% de sa production d’anacarde. Ce pourcentage a été porté à 21 en 2023, soit 344 000 tonnes. Cette croissance épouse l’ambition du gouvernement ivoirien de transformer 50% de la production ivoirienne à l’horizon 2030. C’est dans cette optique qu’en juillet 2022, le gouvernement a mis en service l’unité de transformation de noix de cajou de Toumodi. Montant de l’investissement, plus de 23,849 millions de dollars US (15 milliards de FCFA). L’usine dispose d’une capacité de transformation de 60 000 tonnes par an, selon les données publiées par le Portail officiel du gouvernement de Côte d’Ivoire sur son site. Elle dispose également d’une capacité de stockage de près de 30 000 tonnes, selon la même source.
En juin 2024, la société Ecocajou, spécialisée dans le commerce de noix de cajou, a lancé une unité de transformation à Odiénné. Cette dernière peut transformer jusqu’à 15 000 tonnes de noix par an. Un mois plus tard, le 12 juillet 2024, Robert Beugré, alors Premier ministre, inaugure une unité de transformation de noix de cajou à Boundiali dans la région de la Bagoué. L’infrastructure a été financée à hauteur de 23,849 millions de dollars US (15 milliards de FCFA) par Pan African Agro Commodities (PAAC), une entreprise émiratie spécialisée dans le négoce de matières premières agricoles. Selon les informations relayées, l’unité a une capacité de traitement de 50 tonnes de noix de cajou par jour, soit plus de 18 000 tonnes par an. À travers cet investissement, l’entreprise émiratie ambitionne de porter la capacité de transformation de sa nouvelle unité à 150 000 tonnes par an. A terme, PAAC veut renforcer ce secteur en Côte d’Ivoire avec les fonds injectés dans l’industrie de la transformation locale. En 2024, la Côte d’Ivoire prévoyait traiter 320 000 tonnes de noix en 2024, soit 25 % de la production qui était attendue à 1,2 million de tonnes en début de campagne.
Des initiatives encourageantes
Dans ce même contexte, une usine a été inaugurée à une vingtaine de kilomètres de Yamoussoukro, le 8 janvier 2024 par le ministre d’État, ministre de l’Agriculture, du développement rural et des productions vivrières, Kouassi Kobenan Adjoumani. Il s’agit d’Afcott Cashew Sarl. L’entreprise d’une capacité de transformation de 50 000 tonnes s’était fixée pour objectif de transformer 18 000 tonnes de noix de cajou en 2024, 30 000 tonnes en 2025 et 40 000 tonnes en 2026. Ceci, avant d’atteindre sa phase de croisière en 2027, avec les 50 000 tonnes de production de noix de cajou transformées.
Toujours dans le cadre de sa stratégie de développement de l’industrie de la transformation locale d’anacarde en Côte d’Ivoire, Souleymane Diarrassouba, ministre ivoirien du Commerce et de l’industrie a inauguré une nouvelle unité de transformation de noix de cajou à Attinguié, le 27 janvier 2025. L’installation construite par l’entreprise singapourienne Valency International a coûté 24 milliards FCFA (environ 15,8 millions de dollars). Elle dispose d’une capacité de traitement de 45 000 tonnes de noix de cajou par an.
La construction de ces infrastructures à travers le pays s’inscrit dans le cadre du programme « Vision Côte d’Ivoire 2030 » dont l’ambition est de transformer localement plus de 50% des productions agricoles du pays. Un objectif qui semble lointain, puisque l’industrie locale de transformation n’absorbe que le quart de la production nationale, (estimée à 1 028 172 en 2022). Les unités disponibles dans le pays n’ont qu’une capacité de transformation de 350 000 tonnes, selon les données officielles. Une performance qui place la Côte d’Ivoire au troisième rang mondial des transformateurs, derrière le Vietnam et l’Inde.
Des facilités au service de la valeur ajoutée locale
Avec plus de 15 000 emplois directs, la filière anacarde est la troisième source de revenus agricoles de la Côte d’Ivoire, après le cacao et le caoutchouc naturel. Les producteurs ont généré des revenus estimés à 363 milliards FCFA en 2022, soit une hausse de 7% par rapport à 2021. Le secteur contribue à hauteur de 7% au Produit intérieur brut (PIB) national de la Côte d’Ivoire. D’après les données du Centre du commerce international (ITC), relayées par le CNE dans son document intitulé « marchés potentiels de la Côte d’Ivoire : filière anacarde », la noix de cajou ivoirienne représente plus de 816 millions USD (490 milliards de FCFA) d’exportations en coques, et plus de 171 millions USD (100 milliards de FCFA) d’exportations sans coques.
Pour 2025, les prévisions dans le secteur de la transformation de l’anacarde ivoirienne sont positives. Le pays vise un taux de transformation de 34,7% (400 000 tonnes de noix de cajou) de sa récolte totale attendue de 1,15 million de tonnes pour l’année indiquée, selon VivAfrik. Les autorités ivoiriennes ont pris des dispositions pour atteindre ces objectifs. La Côte d’Ivoire a mis en place une période exclusive pour les transformateurs locaux. Laquelle période va du 24 janvier au 15 mars 2025. Au cours de celle-ci, les transformateurs locaux bénéficieront d’un accès prioritaire aux noix brutes. Ce, avant l’ouverture du marché à l’exportation. Cette démarche s’inscrit dans la stratégie ivoirienne qui vise à donner de la valeur ajoutée à la production locale d’anacarde.
Investissements étrangers à l’assaut du marché
Des initiatives qui séduisent les investisseurs étrangers. À l’occasion du Forum d’investissements dans la filière anacarde, le 23 septembre 2024 à Abidjan, le Conseil du coton et de l’anacarde a signé des accords avec trois entreprises étrangères. Lesquels accords engagent un investissement de 28 millions de dollars US dans des projets de transformation de la noix de cajou. Dans la même veine, en novembre 2024, un deuxième accord a été signé avec la société émiratie Rosyson. Cette dernière prévoit un investissement de 24 millions de dollars dans la construction d’une nouvelle usine d’une capacité de transformation de 60 000 tonnes de noix de cajou par an.
Pour rappel, la production mondiale de noix de cajou était de 3,7 millions de tonnes en 2021, selon la FAO. D’après le Conseil national des exportateurs (CNE), la Côte d’Ivoire est le 1er producteur mondial de cajou. De 2014 à 2022, la production du pays a pratiquement doublé, passant de 520 000 tonnes (2014) à 1 028 172 tonnes (2022) au cours de la période indiquée, soit une hausse de 6% par rapport à 2021. En 2023, cette production est passée à 1 200 000 de tonnes. Selon le Portail de promotion des investissements et de l’économie de Côte d’Ivoire, le pays projette une production de 1 150 000 tonnes, soit une hausse de 20 % par rapport à la campagne de 2024. Cette dernière avait atteint 944 673 tonnes, soit 94 % de l’objectif révisé de 1 000 000 tonnes.
Les investissements réalisés dans le secteur de l’anacarde en Côte d’Ivoire aujourd’hui, permettront d’ajouter de la valeur à cette matière première. Loin d’être une simple fantaisie, la transformation de l’anacarde s’impose comme une nécessité dans un pays qui a bâti son économie sur l’industrie agricole.