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Zambie–Zimbabwe : le barrage Batoka Gorge réactivé avec un investissement de 5 milliards de dollars US

Les gouvernements de la Zambie et du Zimbabwe ont réactivé les démarches pour financer la construction du barrage hydroélectrique de Batoka Gorge, un mégaprojet énergétique estimé à 5 milliards de dollars. Longtemps retardé, notamment à cause de la pandémie de COVID-19, le projet se heurte aujourd’hui à de sérieux défis économiques et environnementaux. Malgré ces obstacles, les deux pays espèrent faire de Batoka Gorge, un pilier de leur stratégie de transition énergétique.

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Puissance en vue : Zambie et Zimbabwe misent gros sur Batoka Gorge

Un potentiel énergétique colossal. Le projet prévoit la construction d’une centrale hydroélectrique de 2400 mégawatts (MW), soit l’équivalent de la puissance de deux réacteurs nucléaires. Il serait implanté sur le fleuve Zambèze, à une trentaine de kilomètres en aval des chutes Victoria, dans une gorge escarpée partagée par les deux pays. Selon la Zambezi River Authority (ZRA), qui coordonne le projet, Batoka Gorge permettra de doubler la capacité énergétique combinée de la Zambie et du Zimbabwe et d’accroître leur indépendance énergétique, dans un contexte où la demande intérieure ne cesse de croître, notamment du fait des activités minières. Le projet pourrait également générer jusqu’à 10 000 emplois directs et indirects, d’après un rapport de la Banque Africaine de Développement (BAD)

Défis économiques : un financement à haut risque

La relance de Batoka intervient dans un climat économique difficile. La Zambie, en défaut de paiement sur sa dette souveraine depuis 2020, finalise encore des négociations avec ses créanciers dans le cadre du Cadre commun du G20, selon le Fonds Monétaire International (FMI). De son côté, le Zimbabwe affiche une dette extérieure de 21 milliards de dollars, dont une grande partie envers la Chine, et fait face à une inflation chronique.

« Le niveau d’endettement de ces deux pays rend la mobilisation de financements extrêmement coûteuse et incertaine », a expliqué Prosper Chitambara, économiste au Labour and Economic Development Research Institute of Zimbabwe (LEDRIZ). Les deux États avaient initialement confié le projet à General Electric (États-Unis) et …

PowerChina, mais Lusaka s’est retirée du contrat en 2023, évoquant des irrégularités dans le processus d’attribution, selon un communiqué officiel du ministère zambien de l’Énergie en 2023.

Le risque climatique : des barrages fragilisés par la sécheresse

L’un des facteurs qui rend le projet stratégique est la vulnérabilité croissante du barrage de Kariba, principale source d’électricité pour les deux pays. D’après le Southern African Power Pool, le niveau d’eau dans le lac Kariba est tombé à moins de 13 % de sa capacité maximale, un niveau critique attribué à la sécheresse provoquée par El Niño.

Cette situation fragilise la production électrique, notamment pour les activités minières zambiennes qui représentent plus de 70% des exportations du pays, selon la Banque mondiale. Dans ce contexte, Batoka Gorge est vu comme une alternative indispensable pour sécuriser les approvisionnements.

Détournement du fleuve Congo : une idée controversée

Parallèlement, la Zambie et le Zimbabwe étudient une initiative risquée : détourner jusqu’à 16 milliards de m³ d’eau par an du fleuve Congo, deuxième plus grand fleuve du monde en volume. L’objectif est de renforcer l’approvisionnement en eau du lac Kariba. Ce projet, relancé récemment par la ZRA, avait déjà été proposé en 2019, mais jugé « technologiquement ambitieux et écologiquement risqué » par International Rivers, une ONG spécialisée dans la protection des cours d’eau africains. Selon le Programme des Nations unies pour l’environnement, un tel transfert impliquerait la construction de centaines de kilomètres de canaux ou de systèmes de pompage énergivores, dans une région au relief accidenté. Des alternatives, comme des canaux gravitaires, sont actuellement à l’étude pour réduire l’empreinte carbone du projet.

Le site de Batoka Gorge est situé à proximité immédiate des chutes Victoria, inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO. Le projet soulève donc des inquiétudes écologiques majeures. Selon une étude environnementale commandée par la ZRA en 2019, la construction du barrage pourrait perturber le débit naturel du fleuve Zambèze, menaçant la biodiversité aquatique et terrestre, ainsi que le tourisme, qui représente jusqu’à 10 % du PIB du Zimbabwe, selon l’Organisation mondiale du tourisme, 2022.

Des financements verts envisagés

Pour surmonter les obstacles financiers, la ZRA a annoncé explorer des mécanismes de financement climatique, notamment auprès du Fonds vert pour le climat (GCF) et de la Banque mondiale, qui soutiennent les projets d’adaptation au changement climatique en Afrique. Selon Munyaradzi Munodawafa, directeur général de la ZRA, « les financements verts pourraient constituer une voie stratégique pour atténuer les coûts du projet, tout en respectant les normes environnementales internationales ».

 

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