Le marché de la construction en Afrique est segmenté par secteur (constructions commerciales, constructions résidentielles, constructions industrielles, constructions des infrastructures (transports), énergie et de service).
A en croire un récent rapport de « Mordor intelligence », la taille du marché africain de la construction devrait passer de 55,60 milliards USD en 2023 à 71,20 milliards d’USD d’ici 2028, avec un TCAC de 5,07% au cours de la période de prévision (2023-2028).
Il s’agit alors, selon l’agence, d’un marché en pleine croissance dont les perspectives à moyen et à long terme demeurent positives. Ce d’autant plus que bon nombre d’États africains placent désormais la construction, peu importe le secteur, au centre de leurs priorités afin de répondre aux besoins et aux exigences d’une population de pas moins de 1,2 milliard d’habitants qui devrait passer à 2,4 milliards en 2050.
C’est cette combinaison d’exigences et de besoins qui ont donc poussé les pays africains à mettre de l’argent dans la construction. Tous secteurs confondus. « Mordor intelligence » indique par exemple sur le sujet que dans l’ensemble, les pays africains avaient annoncé en 2021plus de 570 projets de construction d’une valeur de 450 milliards de dollars.
Avec une valeur de plus de 370 milliards USD, le secteur de l’énergie arrivait en tête, suivi par le secteur des transports avec des projets comprenant des routes, des aéroports et des chemins de fer d’une valeur de 280 milliards USD.
L’étude menée par cette organisation qui collabore avec plus de 6000 entreprises dans 20 secteurs précisant par ailleurs que c’est l’Égypte qui dominait le marché avec plus de 300 projets actifs d’une valeur de 338 milliards de dollars. Avec des projets actifs d’une valeur d’environ 207 milliards de dollars, l’Afrique du Sud arrivait en deuxième position, suivi du Nigeria, qui avait annoncé au cours de la même période, des projets en cours et à venir d’une valeur de 200 milliards USD.
Entreprises locales à la traine
L’industrie africaine de la construction génère donc des milliers de dollars. Elle est la destination privilégiée de la plupart des grandes économies dont les multinationales s’arrachent la quasi-totalité des parts du marché, profitant des avantages croissants, tels que la disponibilité des ressources naturelles ou encore une main d’œuvre bon marché.
Des avantages qui échappent malheureusement encore aux entreprises locales en dehors de quelques-unes à l’instar du Nigérian, « Dangote » qui a par exemple investi dans la construction d’une raffinerie locale capable de traiter 650 000 barils de pétrole par jour. Il s’agit de la plus grande raffinerie à train unique au monde. Elle s’étend sur 2 635 hectares dans la zone de Lekki dans l’Etat de Lagos et aurait coûté plus de 12 milliards USD.
Vinci, Bouygues, Technip FMC…
Moins concurrentielles, les entreprises africaines sont absentes du marché de la construction sur le continent, abandonnant une importante manne financière à d’autres acteurs venant d’Europe, d’Amérique et de plus en plus d’Asie (Chine). Selon Mordor intelligence dans un rapport publié en 2021 sous l’intitulé : « Industrie de la construction – en Afrique analyse de la taille et de la part – tendance et prévisions de croissance (2023-2028), ces principaux acteurs qui se partagent le marché africain de la construction, profitant de l’absence des entreprises locales sont principalement : Vinci, Bouygues, Technip FMC, China communications construction Ltd, China Railway Construction Corporation.
Anciennement dénommée « société générale d’entreprises », Vinci s’organise et se déploie en Afrique autour de trois branches à savoir la concession, les énergies et la construction. En 2021, Vinci énergie, filiale du géant du BTP a par exemple signé avec le Bénin un contrat de construction d’infrastructures de transport et de distribution d’électricité pour 292 millions d’euros.
Ce dernier prévoit la construction durant trois ans de 500 km de lignes de transport en haute et très haute tension, de 1 000 km de réseau de distribution en moyenne et basse tension et 11 postes de transformation.
Le Français, qui a réalisé en 2020 un chiffre d’affaires de 13,7 milliards d’euros, a signé en 2019 pour 02 milliards d’euros un contrat avec le Kenya, dont 1,6 milliard sur 30 ans pour l’attribution de la concession de l’autoroute Nairobi-Nakuru-Mau Summit. Au Cap vert, Vinci airport a obtenu en 2022, un financement de 60 millions d’euros pour son contrat de concession des aéroports du pays. Contrat qui concerne 04 aéroports de standards internationaux et 03 aérodromes.
Le cahier de charges confère par ailleurs au Français la responsabilité de financer, exploiter, entretenir, étendre et moderniser ces aéroports au cours de 40 prochaines années aux cotés de sa filiale portugaise (ana-aéroporto de Portugal), détentrice de 30% de la société concessionnaire.
Au Cameroun, à travers sa filiale Sogea-Satom, le géant tricolore a par exemple pour ne citer que ces quelques cas été retenu pour mener à bien des projets majeurs de routes pour le compte du ministère en charge des Travaux publics. Entre autres, l’un d’un montant de 112 millions d’euros porte sur l’aménagement d’un tronçon de 135 km sur la RN15 entre Lena et Tibati au centre du pays et l’autre portant sur la réhabilitation et l’aménagement de la pénétrante Ouest de la ville de Douala pour un montant de 75 millions d’euros. En Égypte, Vinci gagnait la construction du métro pour la somme de 03 milliards d’euros. Ainsi que bien d’autres projets majeurs dans toute l’Afrique.
Très présent sur le continent noir, Bouygues un autre géant français apparait également dans le top cinq des multinationales étrangères qui se partagent le marché de la construction en Afrique, d’après l’étude précitée. C’est ainsi qu’avec sa filiale américaine, « Américaribe », Bouygues construction a par exemple gagné en 2016, le contrat d’extension du « Rude Hospital » d’Accra au Ghana pour un montant de 202 millions d’euros.
En 2022, le groupe fondé en 1952 par Francis Bouygues signait avec la société de transport abidjanaise sur rail (Star) un nouvel avenant au contrat de conception, de construction, exploitation et de maintenance de l’infrastructure d’un montant de 1,77 million d’euros. Et en 2020 pour ne citer que ces cas le contrat de 175 millions d’euros pour le développement et la réalisation du centre hospitalier universitaire d’Abomey-Calavi au Benin.
En Angola par exemple, c’est le leader mondial des projets onshore/offshore et surface, Technip FMC qui a remporté le contrat d’installation des conduites flexibles et structures sous-marines. Contrat que le franco-américain a décroché chez TotalEnergies afin de développer ses activités sur une des zones les plus prometteuses d’exploitation pétrolière offshore de ce pays.
Bien que les détails financiers de cet accord n’aient pas été divulgués lors de la signature du contrat en mai 2022, les analystes pétroliers ont cependant avancé un montant de 100 millions USD. En 2021, l’entreprise s’était déjà vu confier l’ingénierie, l’approvisionnement et la fourniture de conduites sous-marin pour un autre projet (GIR Lifex), toujours dans ce pays et en ce temps on parlait d’un « contrat significatif qui se situe entre 75 et 250 millions USD ».
L’offensive chinoise
Depuis le début de la rencontre avec l’occident, les multinationales basées en Europe et aux Etats-Unis se sont toujours taillées la part du lion dans le marché de la construction en Afrique. Mais aujourd’hui, l’empire du milieu à travers ses entreprises gagne de plus en plus du terrain.
En Angola par exemple, China Railway Construction Corporation (CRCC) a construit et mis en service la ligne ferroviaire, Lobito-Luau, longue de 1 344 kilomètres. Reliant Lobito (ouest) à Luau (est) qui borde la RDC, elle constitue le deuxième plus long chemin de fer construit par une société chinoise en Afrique après le chemin de fer Tanzanie-Zambie. CRCC a également construit le métro léger d’Addis-Abeba en Ethiopie.
Il s’agit de la première ligne de transit léger sur rail en Afrique avec deux lignes longues de 34 kilomètres. Il est capable de transporter 60 000 passagers par jour. Enfin et pour ne citer que ces cas, cette multinationale chinoise a réalisé le pont de Kigambini en Tanzanie, long de 680 mètres pour un coût de 135 millions de USD. Ou encore la centrale électrique de Garissa, projet financé par la banque d’import-export de Chine pour un montant de 135 millions USD.
China communication construction Ltd (CCCC) pour sa part, un autre géant chinois, s’est illustré sur le continent dans la construction au Maroc de la cité Mohammed VI ou encore au Mozambique avec le projet du pont de Maputo, actuellement le plus grand pont suspendu d’Afrique avec une longueur totale de 3 kilomètres et une travée principale de 680 mètres.
Mais c’est en Ethiopie, à en croire « Jeune Afrique » que la CCCC a eu plus de projets. Que son expansion est plus aboutie. Depuis 2008, d’après le responsable du géant étatique chinois des BTP, « plus de 2,4 milliards USD ont été réalisés dans ce pays, comprenant des parcs industriels et plus de 2500 kilomètres d’autoroute ».
A cela, il faut ajouter la réalisation des travaux d’extension de l’aéroport de Bole à Addis-Abeba, ainsi que de 3,6 milliards USD d’autres chantiers en cours.