Avec l’explosion de la téléphonie mobile en Afrique dans les années 2000, l’Afrique est parvenue à rattraper son retard dans le secteur des télécommunications par rapport aux pays développés. A en croire le groupe « Morgan Philips », « le taux de couverture GSM, qui était de 10% en 1996, est passé à 80% en 2010 ».
En 2008, 246 millions d’Africains avaient souscrit à un abonnement, contre 51,8 millions en 2003. Par la suite, les années 2010 ont changé la donne d’utilisation des mobiles avec l’arrivée des smartphones nécessitant un accès à internet.
Ainsi en 2016, 700 millions d’Africains utilisaient un téléphone mobile, la moitié étant des smartphones.
En 2020 c’est plus de 600 millions d’habitants qui possédaient un smartphone, soit le double qu’en 2016.
En Afrique subsaharienne d’après une étude de la GSMA, l’Association mondiale des Opérateurs des Télécoms, 495 millions de personnes avaient souscrit aux services des opérateurs mobiles à la fin de l’année 2020, une augmentation de près de 20 millions par rapport à 2019. Le nombre d’abonnés devant s’élever à 615 millions dans cette zone du continent noire d’ici 2025.
En Afrique de l’Ouest par exemple, le nombre d’abonnés mobile, toujours à en croire GSMA a atteint 185 millions à la fin 2018, soit 48% de la population de cette sous-région. Ce nombre, prévoit-on, devrait atteindre 248 millions en 2025. Soit 54% de la population composée majoritairement des jeunes.
Un accroissement, indique l’AFD, qui va de pair avec l’augmentation des données mobiles. L’Afrique et la région Moyen-Orient connaissant alors le plus fort trafic desdites données, marqué par une croissance de 96% en 2016.
Défis, opportunités et enjeux
Si ces chiffres peuvent être biaisés, il n’en demeure pas moins que beaucoup d’Africains ont en moyenne deux téléphones portables pour des raisons techniques et ou économiques. Le nombre d’abonnés aux services mobiles, sans cesse croissant étant alors révélateur de l’utilité du cellulaire en Afrique.
Au-delà d’être un outil de communication, le mobile ne cesse de révolutionner les pans de l’économie du continent. Son essor et sa généralisation ont par exemple favorisé l’accès aux services financiers et bancaires, apportant ainsi une solution à la demande croissante de bancarisation sur le continent.
En témoigne l’évolution fulgurante du mobile money et du mobile banking. En plein cœur de la crise de la Covid-19, le continent africain est ainsi resté leader des transactions d’argent via le mobile en 2020, le nombre de comptes étant passé de 469 millions à 548 millions, soit une augmentation de 12%. La valeur des transactions quant à elle ayant progressée de 23%, d’après les chiffres de la GSMA.
Le secteur agricole, prééminent dans les pays africains, à en croire des experts n’est pas laissé pour compte par le passage du mobile. Au contraire, des études ont montré son rôle dans l’amélioration des marchés.
Tout comme en Inde où l’usage du portable permet aux pêcheurs d’aller débarquer les poissons là où meilleur prix leur est offert, au Niger, des céréaliers interrogés affirment qu’ils ont pu augmenter leur zone d’attraction commerciale et donc leur prix de réserve grâce au mobile.
L’introduction de la téléphonie mobile au Niger (l’un des pays les plus pauvres du monde) entre 2001 et 2006 a de fait coïncidé avec une réduction d’au moins 10% de la dispersion des prix des céréales. Celle-ci a également été associée à une réduction de 12% de la variation annuelle des prix des céréales.
Ce faisant, il est donc indéniable que la téléphonie mobile joue un rôle crucial dans l’amélioration des conditions de vie des populations. Facilitant en outre, entre autres, l’accès aux services administratifs, aux soins ou encore à l’éducation.
Bien plus, en transformant les échanges économiques dans le domaine du commerce, principalement du e-commerce la téléphonie et l’accès au réseau créent de nombreuses opportunités d’emplois, tout en stimulant la croissance économique des pays africains.
L’exemple de l’Afrique subsaharienne est relativement éloquent. Les technologies et les services mobiles ayant généré 8% du PIB en 2020 et ayant fourni quelques 300 000 emplois formels, plus d’1 million d’emplois informels, tout en soutenant 1,8 millions d’emplois supplémentaires dans d’autres secteurs de l’économie,
peut-on lire dans un rapport de GSMA, paru en 2021.
En 2018 toujours d’après la GSMA, l’écosystème de la téléphonie mobile (les opérateurs, les fournisseurs d’infrastructures, les vendeurs et les distributeurs de produits et de services mobiles, les fabricants de terminaux mobiles et les fournisseurs de contenus, d’applications et de services mobiles) en Afrique de l’Ouest a par exemple généré une valeur économique de plus de 50 milliards de dollars en 2018. Soit 8,7% du PIB de la région.
Une performance justifiée selon l’information contenue dans « The mobile economy west Africa 2019 » par l’augmentation du nombre de propriétaires de téléphones mobile. Le rapport indique par ailleurs qu’au cours des prochaines années, la migration continue vers les réseaux et les services mobiles à haut débit dans la région entraineront une hausse régulière de la contribution économique de cet écosystème économique à près de 70 milliards de dollars (9,5% du PIB en 2023).
Avec une population devant atteindre près de 2,4 milliards d’habitants en 2050, la moitié ayant alors moins de 25 ans, à en croire les projections des Nations-Unies, l’intérêt de l’Afrique est alors de profiter ce cette croissance démographique à l’initiative de la croissance du marché de la téléphonie mobile sur le continent.
Le marché de la téléphonie mobile actuellement dominé par le groupe MTN (227,3 millions d’utilisateurs en 2021), Orange Afrique et Moyen-Orient (130 millions en 2021), le groupe Vodacom (123,7 millions en 2021), Airtel Afrique (78 millions en 2020), Safaricom (39,90 millions en 2021), les pays africains gagneraient alors favoriser la naissance d’autres opérateurs africains de taille à l’instar de MTN qui se discute le marché continental avec pour la plupart des multinationales étrangères. Ce, dans l’optique de capter tous ces subsides qui lui échappe.
Par ailleurs, les pays du continent doivent mettre sur pied des politiques permettant de ne pas freiner l’engouement des populations pour le mobile du fait des défis qui restent à relever, notamment et pour ne citer que le cas de celui des infrastructures dont l’insuffisance au regard de la demande et des besoins de la population ne cesse de croître.
En effet, certains territoires et régions du continent sont confrontés à un manque d’infrastructures, conduisant ainsi à des inégalités dans l’accès au réseau et in fine dans le déploiement de la téléphonie mobile en général et la pénétration de l’internet mobile en particulier depuis l’avènement des smartphones.
Deux problématiques indiquent la GSMA, sont particulièrement inhérentes aux zones blanches sur le continent : Le manque d’électrification et le problème de transmission. Ceci obstruant dès lors la mise en place d’infrastructures nécessaires au déploiement optimal du réseau.
Les chiffres sont à ce sujet éloquent : 300 millions d’Africains vivent à plus de 50 kilomètres d’une connexion haut débit. Moins d’un tiers des Africains, renchérit la Banque mondiale, ont accès à une connectivité haut débit.
Sur les 25 pays les moins connectés au monde, 21 sont situés sur le continent noir. Seulement 36% de pénétration d’internet en Afrique se compare mal à la moyenne mondiale de 62,5%, conclu la banque.
Pourtant, la Banque mondiale estime qu’en Afrique, une augmentation de 10% de la pénétration de l’internet mobile pourrait se traduire par une augmentation de 2,5% du PIB.
Et d’après un rapport de la SFI et de Google,
l’économie internet de l’Afrique est l’une des plus grande opportunités d’investissement négligées disponibles avec un potentiel d’ajouter de 180 milliards de dollars au PIB de l’Afrique en 2025.
Mas ce potentiel d’opportunités de croissance numérique du continent, aussi vaste soit-il, dépendra essentiellement de la garantie d’un accès numérique abordable et généralisé. Ceci, à son tour nécessitera des capitaux importants de la part des investisseurs locaux, étrangers en action et des financiers.