La Côte d’Ivoire fournit 40% de l’offre mondiale de noix de cajou. Selon Adama Coulibaly, l’ancien directeur général du Conseil coton-anacarde, la production ivoirienne va passer à un million de tonnes (Mt) en 2024, contre 1,225 Mt en 2023. Une contre-performance due aux conditions climatiques défavorables. L’ex directeur avait également précisé que le taux de transformation local de la noix de cajou en amande s’est établi à 21% (265 863 tonnes) en 2023 avec une trentaine d’unités industrielles d’une capacité totale de 350 000 tonnes.
Les autorités ivoiriennes veulent capitaliser la position de leader du pays dans la production de noix de cajou dans le monde, afin de porter haut l’industrie locale. C’est dans ce contexte que le ministère en charge de l’Agriculture a suspendu temporairement les exportations de noix de cajou brutes le 7 mai 2024. L’objectif de cette mesure étant de promouvoir la transformation locale tout en garantissant l’approvisionnement des unités de transformation nationale.
Durant la période de suspension, seuls les achats de noix brutes de cajou par les transformateurs et les acheteurs agréés pour approvisionner les unités de transformation étaient autorisés. Une initiative inscrite dans le cadre de la politique nationale de développement et de promotion de l’agro-industrie de la Côte d’Ivoire. À travers cette suspension temporaire des exportations de noix de cajou, les ambitions du gouvernement ivoirien étaient claires : stimuler la croissance de l’industrie de transformation locale. Une stratégie mise en place pour valoriser davantage la matière première sur le marché international.
Le défi de la transformation
De nouveaux investissements réalisés par le secteur privé renforcent davantage la capacité de transformation de l’industrie locale en Côte d’Ivoire. Début juillet 2024, le Premier ministre Robert Beugré a inauguré une unité de transformation de noix de cajou à Boundiali dans la région de la Bagoué. L’infrastructure a été financée par l’entreprise émiratie Pan African Agro Commodities (Paac) à hauteur de 24,9 millions USD (15 milliards de FCFA).
Construite sur 10 hectares dans le village communal de Tombougou-Samorosso, l’unité dispose d’une capacité de traitement de 50 tonnes de noix de cajou par jour, soit plus de 18 000 tonnes par an. D’après les informations relayées par les médias locaux, cet investissement vise à porter à 150 000 tonnes par an, la capacité de transformation de la nouvelle unité. Cette dernière peut compter sur les producteurs locaux de la région de la Bagoué pour s’approvisionner en matière première.
La région concentre au moins 10% de la récolte nationale de noix de cajou qui s’élève à plus d’un million de tonnes, selon les données officielles. Notons que cet investissement de l’entreprise Paac devrait renforcer la capacité de transformation de l’industrie locale ivoirienne qui prévoit de traiter 320 000 tonnes de noix en 2024, soit 25% de la production qui était attendue à 1,2 million de tonnes en début de campagne.
Neuf industries agréées pour exporter aux Etats Unis en 2022
Des entreprises locales ivoiriennes ont compris la nécessité d’exporter un produit transformé. En 2022, neuf industries en Côte d’Ivoire ont été agréées pour exporter leurs produits aux États Unis. Ces neuf unités de transformation de noix de cajou ont reçu leur certification américaine Food Safety Modernization Act (Fsma), renseigne Commod Africa.
Ces entreprises sont SG Agro à Yamoussoukro dont la capacité de transformation annuelle est de 20 000 t, Dorado Ivory à Toumodi (20 000 t), STNC à Abidjan (6 000 t), CI Cajou à Dabakala (10 000 t), Cilagri Cajou à Vrid, à Abidjan (30 000 t), Ivory Cashew Nuts à Bouaké (15 000 t), Food’s Co à Béoumi (15 000 t), Quang Thien Imex à Yopougon (10 000 t) et Cita à Yamoussoukro (6 000 t). Ces unités de transformation représentent 50% du volume total des noix de cajou transformées en Côte d’Ivoire en 2022, selon la même source.
Deuxième produit d’exportation après le cacao
La noix de cajou est une culture essentielle pour la Côte d’Ivoire. En 2022, elle contribuait à plus de 9% au Produit intérieur brut (PIB) du pays. En 2023, avec l’implantation d’unités industrielles, le pays a atteint un niveau de transformation de plus de 25%. Constat fait à cette période par Soro Bêh alors président de l’Organisation de l’interprofession agricole de la filière anacarde. De 350.000 tonnes en 2010 à plus de 1.040.000 tonnes produites en 2021, l’anacarde est devenu le deuxième produit agricole d’exportation de la Côte d’Ivoire. Lors de la campagne 2017, plus de 847,372 millions de dollars US (508 milliards FCFA) de revenus ont été redistribués aux producteurs.
Pour concrétiser sa politique de transformation, le gouvernement a mis en place un Centre d’innovation et des technologies de l’anacarde (Cita) pour permettre à la Côte d’Ivoire de disposer d’un outil performant de formation et d’assistance technique. A ce Centre s’ajoute la mise en œuvre du Projet de promotion de la compétitivité de la chaîne des valeurs de l’anacarde (Ppca). D’un coût de 200 millions de dollars, ce programme vise à renforcer la gouvernance du secteur. Des appuis qui ont fait de la filière anacarde un véritable levier de développement économique et social en Côte d’ivoire.
Le pari de la qualité
Pour rendre compétitifs les produits ivoiriens sur le marché, les autorités misent sur la qualité. Le 1er août 2024, la Direction de la promotion de l’investissement et du développement du secteur privé (Dpidsp), en partenariat avec la Chambre de commerce et de l’industrie de Côte d’Ivoire (CCI-CI) et le Centre ivoirien de recherche économique et social (Cires) a lancé une étude dont l’objectif est de trouver des voies et moyens qui permettront aux produits locaux de gagner des parts importantes sur le marché local.
Parmi ces produits, l’anacarde qui est au centre de la politique de développement de l’industrie locale ivoirienne depuis quelques années. Du 18 au 25 août 2024, des équipes du Conseil Coton-Anacarde (CCA) ont sillonné des zones de production de l’anacarde à l’intérieur du pays afin de sensibiliser et former les producteurs d’anacarde.
Cette rencontre participe de la sensibilisation des producteurs, de sorte qu’ils puissent améliorer la qualité des noix brutes de cajou. La Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial de noix de cajou avec plus de 1,2 million de tonnes. Cela voudrait dire que nous avons gagné la bataille de la quantité. Nous sommes maintenant dans la bataille pour gagner aussi la qualité pour que notre pays soit le premier producteur mondial de noix de cajou, en quantité et en qualité. Pour ce faire, le Conseil du coton et de l’anacarde qui a initié cette formation, a bien voulu que nous puissions parcourir le bassin anacardier pour rencontrer nos parents producteurs et les entretenir sur comment faire la qualité,
a déclaré aux médias locaux, Bassimouri Traoré, sous-directeur des filières de production végétale à l’Agence nationale d’appui au développement rural (Anader).
La Côte d’Ivoire veut donc s’attaquer à la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) avec des produits locaux compétitifs.